Alors que la SNCF et la RATP utilisent un nouveau moyen d’identifier les fraudeurs afin d’encaisser le paiement des amendes, voici une petite histoire de train qui prête à rire, découverte dans les archives de L’Ouest-Eclair, ancêtre de Ouest-France. Le 15 août 1904, Yves, 22 ans, et Jean, 20 ans, tous deux originaires de Brest dans le Finistère, rêvaient de voir Paris: les grands boulevards, les beaux cafés, les guinguettes… Avec le chemin de fer, la Ville lumière n’est plus qu’à « une dizaine d’heures! »
Seulement, pour voyager, il faut un billet. Or, les deux amis sont fauchés comme les blés. Ils élaborent alors un plan de première classe pour voyager gratis: se cacher dans les W-C. « De nuit, ils se glissèrent dans la gare de Brest et, montant dans le train de luxe, ils s’enfermèrent dans les cabinets, attendant les événements », détaille L’Ouest- Éclair. « Le lendemain matin, le train se mit en marche. Au début, tout alla bien. Quelques coups discrets furent bien frappés de temps à autre à la porte, mais les “voyageurs” se gardèrent bien de répondre et, personne n’insistant, les deux farceurs purent croire un instant que leur voyage s’effectuerait dans les meilleures conditions possibles. » C’était sans compter sur les lois de la nature…
Désormais sous haute pression, les voyageurs s’en prennent au conducteur et au contrôleur. « Un léger malaise régnait dans le convoi », reprend le journal. Quelques personnes jetaient des regards éplorés vers le discret buen retiro à la porte obstinément close. Il y avait là une énigme dont il importait à tout prix d’avoir la clef. Mais la clef du mystère est aussi celle des cabinets. Or, personne ne l’a. Il n’y a rien à faire. Le train entre enfin en gare. Yves et Jean attendent encore un peu pour sortir incognito. Ils ouvrent la porte. « Paris, nous voilà ! » Malheureu- sement pour eux, ce n’est pas Paris qui les attend à la sortie mais un contrôleur furieux et un commissaire de police muni de PV. Remis dans le premier train pour Brest, nos champions de la fraude n’ont rien vu de Paris. Pire ! Ils ont laissé leurs noms dans plusieurs journaux français à gros tirages. De vrais as !