Le 11 juin dernier, les habitants de Mussidan en Dordogne, y compris les enfants des écoles primaires, se sont réunis sur le parvis de la gare pour commémorer une action de la Résistance menée quatre-vingts ans plus tôt. Le 11 juin 1944, dans le but de retarder les renforts allemands destinés au front de Normandie, 200 résistants du 4e bataillon FTP attaquent un train blindé ennemi, chargé de protéger la ligne ferroviaire Bordeaux – Périgueux. Cette ligne est alors la seule encore en état pour le transfert d’éléments de la division SS Das Reich, stationnée à Périgueux, et pour le transit de pièces d’avions assemblées dans les carrières souterraines de Saint-Astier. « L’un des nôtres est passé sous la chaudière de la locomotive et est remonté sur le train pour y déverser ses grenades. C’était très dangereux. Nous ne pensions pas à la peur », explique Albert Laborie, 99 ans, le dernier résistant rescapé de cette journée qui se terminera de manière tragique.
A l’époque, il avait 20 ans et son nom de guerre était Théo. « Aujourd’hui, on m’appelle encore Théo », dit-il en souriant. La destruction du train entraîne la mort de neuf maquisards, dix soldats ennemis et du cheminot réquisitionné, Marcel Chiesa, chef de train et conducteur. À ce moment-là, la 11e Panzer Division blindée de la Wehrmacht, en provenance de Bordeaux, arrive à Mussidan de manière inattendue. Elle attaque aussitôt les maquisards, qui parviennent à se replier.
Par mesure de représailles, l’occupant, fou de rage, procède à une rafle de plus de 350 personnes parmi la population de Mussidan et des villages voisins, et sélectionne des hommes de plus de 16 ans, mal rasés, portant des chaussures sales et des habits froissés, et donc considérés comme maquisards. Dans la soirée, cinquante-deux civils, dont le maire Raoul Grassin et son secrétaire Camille Christmann, sont froidement exécutés par la Gestapo. Deux hommes blessés survivront par miracle. Cent douze personnes seront déportées. Le massacre des civils à Mussidan situe la cité périgourdine à la dixième place des villes martyres en France. Le 11 juin dernier, en présence des écoliers, Albert Laborie confiait: « Je suis très heureux de voir cette jeunesse ici. Cela fait du bien. Il faut en parler. Il ne faut pas oublier… »