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La renaissance du rail
1947 (2
de
partie)
avec
votre journal
MAGAZINE
3:HIKPKE=ZUY^UX:?d@m@p@i@a;
F:
La Vie du Rail
– 20 juillet 2011

La DB se frotte les mains: la future grande gare de Stuttgart
aurait passé son «stress test». L’annonce, qui devrait être
officialisée le 14 juillet, marque une étape cruciale dans la bataille
engagée depuis plus d’un an face aux nombreux opposants à ce
projet chiffré à plus de 4,5 milliards d’euros. Pour mettre fin à la
polémique, les deux parties avaient accepté de suspendre le
chantier aux résultats d’un test de résistance. L’enjeu: estimer si
le nouvel édifice est en mesure d’accroître de 30% les capacités
ferroviaires de la capitale souabe. En cas de réponse négative, le
projet aurait dû être sérieusement retoqué. Cela ne devrait donc
pas être le cas, et la DB appelle désormais au respect du verdict
de cet examen. Sans succès: la controverse continue et des heurts
ont même opposé «pro» et «anti» Stuttgart 21 fin juin. Alors que
les travaux ont repris, les adversaires de la gare réclament
toujours la tenue d’un référendum.
A. H.

Stuttgart 21: la Deutsche Bahn aurait réussi son «test de résistance»
Autrefois vache à lait du groupe, le S-Bahn berlinois n’en finit plus
de plomber les comptes de la Deutsche Bahn. Victime depuis deux
ans de déboires techniques à répétition, l’activité a perdu
222,2millions d’euros en 2010: un record.
La compagnie est d’abord sanctionnée par le Land de Berlin, qui a
revu ses subventions à la baisse pour non-respect du contrat
d’exploitation: 60 millions d’euros ont ainsi été retenus. Mais la
société de train urbain doit aussi faire face à d’importantes
dépenses de maintenance: au plus fort de la crise, les deux tiers
de sa flotte ne répondaient plus aux normes de sécurité et ont dû
repasser par l’atelier. Montant de la facture: 128,6 millions
d’euros.
Plus que jamais, se pose la question d’une privatisation partielle
du réseau de S-Bahn, après 2017, date à laquelle prend fin le
contrat liant la DB au Land de Berlin.
Malgré les perturbations, les associations d’usagers s’y opposent:
une pétition circule qui pourrait déboucher sur une action
collective et un référendum, pour faire échec à ce scénario.
A. H.

Déficit record pour le S-Bahn de Berlin
Aldinger & Wolf

La Vie du Rail
– 20 juillet 2011
RÉGIONS
François-Xavier POINT
S
itué à quatre kilomètres au
nord de Saint-Jean-de-Luz sur
la ligne Paris – Hendaye, le
remblai de l’Issaca subit depuis
le mois d’avril des travaux de
confortement en raison de son
instabilité persistante. Malgré
plusieurs interventions depuis
1990, et notamment un épau-
lement entrepris l’an dernier
sur le côté ouest, il est apparu
que le nivellement de la voie
laissait à désirer. C’est la der-
nière tranche de travaux im-
portants qui se déroule. Elle
impose bien évidemment une
limitation temporaire de vitesse
à tous les trains.
Afin de consolider définitive-
ment l’ensemble et d’éviter un
affaissement important de la
voie, c’est la solution du
clouage qui a été retenue sur
le côté est du remblai. Elle
consiste en l’occurrence à
planter, après forage, des pieux
armés à seize mètres de pro-
Aquitaine.
Confortement du remblai de l’Issaca
à Saint-Jean-de-Luz
Les travaux sur la ligne Paris – Hendaye imposent une limitation temporaire de vitesse à tous les trains.
A
fin de réguler automatique-
ment la circulation des trains
entre les gares de Coutras (Gi-
ronde) et de Périgueux (Dor-
dogne), RFF vient d’investir
environ 9millions d’euros
pour l’installation d’un bloc
automatique à permissivité
restreinte (BAPR) sur cette
portion de ligne importante.
Ce bloc automatisera la circu-
lation des trains avec un espa-
cement d’environ 15km en-
tre chaque passage (longueur
des cantons). À terme, cet
équipement permettra d’ac-
croître la capacité de la ligne,
et ainsi d’accompagner la po-
litique régionale d’augmenta-
tion des dessertes.
Sur cet axe ferroviaire, partie
intégrante de la ligne Coutras
– Tulle (Corrèze), traversant
cinq cantons et les gares de
Coutras, Montpon-Ménesté-
rol, Mussidan, Saint-Astier et
Périgueux, la circulation des
trains était jusqu’à présent ré-
gulée par l’intervention ma-
nuelle des chefs de service
dans ces gares. Ils avaient pour
mission d’ouvrir le signal de
départ d’un train après s’être
assurés que celui-ci était com-
plet, que le canton à venir était
bien libre et après avoir libéré
le canton précédent.
Dès le 11novembre, l’espace-
ment des trains se fera auto-
matiquement et seulement par
l’indication des signaux. Entre
les gares, la voie ne sera pas
La régulation des trains est automatisée entre
Coutras et Périgueux
fondeur. Afin de travailler dans
de bonnes conditions, une
plateforme a été créée à mi-
hauteur du remblai, dans les
emprises de RFF. La zone d’in-
tervention des entreprises
Guintoli et Sud Fondations
s’étend sur une longueur de
cent vingt mètres.
Dans des excavations effec-
tuées à l’aide d’une tarière de
mine, des tubes d’un diamè-
tre de six cents millimètres
sont ancrés dans le sol calcaire
– qui se rencontre à partir de
treize mètres – et emplis de
béton. Ces tubes, arrivés d’Ita-
lie par camion, sont disposés
en quinconce tous les deux
mètres cinquante. Au nombre
de cent trente et à raison de
dix mètres cube de béton par
tube, plus de mille trois cents
mètres cubes sont nécessaires,
compte tenu d’une surcon-
sommation due à la présence
de zones de sable dans le sol.
«La difficulté de ce chantier ré-
side dans la proximité d’une ligne
à haute tension de 63000V, qui
nous a occasionné de gros sou-
cis. Une zone de non-interven-
tion devant être impérativement
respectée et vu la configuration
des lieux, il reste peu de place
pour l’évolution des engins en
toute sécurité»
note Alain
Mothes, maître d’œuvre tra-
vaux de la SNCF à l’Infralog
de Bordeaux.
Après ce chantier, financé à
100% par RFF, il restera tou-
tefois, dans la même zone, à
poser des drains afin de cana-
liser les eaux de pluie et en-
traîner leur évacuation.
François-Xavier POINT
La Vie du Rail
– 20 juillet 2011

équipée de zone électrique.
L’occupation des cantons sera
matérialisée par des comp-
teurs d’essieux situés à chaque
entrée et à chaque sortie de
tous les cantons; un calcula-
teur par canton comparera le
nombre d’essieux à la sortie
par rapport à l’entrée, vérifiant
ainsi que le train est sorti com-
plet du canton. Si cela ne de-
vait pas être le cas, le signal
d’entrée resterait rouge et im-
mobiliserait le train suivant.
Ce chantier réalisé en cotrai-
tance par les entreprises de gé-
nie civil SITS et ETF, spéciali-
sées dans les travaux ferro-
viaires et par l’entreprise de gé-
nie électrique Forclum, s’étale
sur 75km. Éric Feriot, le chef
de lot signalisation de l’Infra-
log Aquitaine donne quelques
détails.
«Les travaux ont com-
mencé en juillet2010 et la mise
en service est prévue le week-end
du 11novembre prochain. Cela
a nécessité le déroulage de
140km de câbles armés de
14paires, 4km de câbles de
28paires, la création de 22gué-
rites pour abriter les relais et les
appareils de signalisation et 12
nouveaux signaux. Les équipes
SNCF d’Infralog et de l’Ingénie-
rie de Bordeaux et de Limoges
procèdent actuellement aux vé-
rifications techniques et aux es-
sais de toutes les installations
sans perturber la circulation des
trains.»
La gare de Mussidan se situant
à mi-chemin entre Coutras et
Périgueux et possédant plu-
sieurs voies de garage restera
ouverte à la circulation. Celles
de Montpon-Ménestérol et de
Saint-Astier resteront ouvertes
uniquement pour les fonc-
tions commerciales.
Bernard CHUBILLEAU
Midi-Pyrénées.
Les travaux de la ligne
Toulouse – Latour-de-Carol sont terminés
D
epuis le 2juillet dernier, la
ligne TER Toulouse – Latour-
de-Carol est rouverte intégra-
lement, après trois mois de tra-
vaux dans le cadre du
chantier de l’ambitieux Plan
rail Midi-Pyrénées, traitant la
section Portet-Saint-Simon à
Tarascon-sur-Ariège. La voie de
cette section de 86km a été re-
nouvelée sur 49km. Des tra-
vaux sur les ouvrages d’art ont
aussi été exécutés, dont ceux
sur l’étanchéité du pont de
l’Écho à Foix et sur le confor-
tement du mur de soutène-
ment de Saint-Paul-de-Jarrat.
Ces travaux représentent un
investissement de plus de
31millions d’euros et sont fi-
nancés par tiers par le conseil
régional Midi-Pyrénées, RFF et
l’État. En 2009 avait été traitée
la section haute du «Transpy-
rénéen oriental» entre Taras-
con et Latour-de-Carol
(66km) où se situe le tunnel
du Puymorens, long de
5,4km, le plus haut à voie
normale du réseau, à 1567m
d’altitude. Profitant de l’inter-
ception de trois mois entre
Toulouse et Latour-de-Carol,
RFF, sur ses fonds propres, a
renouvelé la voie de ce tunnel
pour un coût de 1,9million
d’euros. Les travaux de voies
et d’étanchéité ont été réalisés
par un groupement d’entre-
prises dont le mandataire est
TSO. Par ailleurs, afin d’amé-
liorer l’accessibilité en gare, les
quais ont été mis à la hauteur
de 55cm au-dessus des rails
dans les gares de Portet-Saint-
Simon, Pins-Justaret, Ve-
nerque-Le Vernet, Auterive,
Cintegabelle, Saverdun, Le Ver-
net-d’Ariège, Pamiers, Varilhes,
Saint-Jean-de-Verges, Foix et
Tarascon-sur-Ariège. Ces quais
rehaussés sont dotés d’un che-
minement facilité vers les par-
kings et d’un éclairage adapté.
Les travaux ont été réalisés par
Colas Rail. Le financement, de
plus de 7millions d’euros, est
cofinancé par les fonds euro-
péens Feder (46%), la région
Midi-Pyrénées (42%) et RFF
(12%). La maîtrise d’œuvre de
ces opérations avait été confiée
à la SNCF par RFF, maître
d’ouvrage du Plan rail Midi-
Pyrénées. Les travaux sur le
«Transpyrénéen oriental»
avaient débuté le 2avril der-
nier et la section Toulouse – Pa-
miers traitée en premier avait
été rouverte le 16mai.
Bernard VIEU
Cahors –
Capdenac : c’est
fini
Ouverte le 14juillet 1886,
fermée aux voyageurs le
29septembre 1980 et au
fret le 1
octobre 1989, la
ligne Cahors – Capdenac,
longue de 71,35km a été
fermée administrativement
par RFF le 9juin dernier sur
68,5km, entre les deux bi-
furcations (à Cahors et à
Capdenac). Des études ont
confirmé l’absence de pers-
pectives d’une reprise de
trafic tant TER que Fret. La
région Midi-Pyrénées avait
donné un avis favorable à la
fermeture. Afin de préserver
l’avenir, la ligne n’est pas dé-
classée ni cédée. Des pro-
jets de valorisation sont en
cours, tels que piste verte
côté Cahors, vélorails et train
touristique. La dépose de
l’aiguille de la bifurcation de
la ligne à Cahors n’a pas en-
core eu lieu. Celle côté Cap-
denac a été remplacée l’an
dernier dans le cadre du Plan
rail Midi-Pyrénées…
B. V.
En gare de Saverdun, un AGC dont le plancher est à la même hauteur
que le quai à présent rehaussé.
Bernard VIEU
L
e 4 juillet, Noursultan Na-
zarbaïev, président du Ka-
zakhstan, a posé la première
pierre du tramway d’Astana,
sur le site de l’université Na-
zarbaïev. Alstom, dont le PDG
Patrick Kron assistait à la cé-
rémonie, livrera clé en main
avec ses partenaires une ligne
de 27 stations sur 40km
(dont plus de 10km en via-
duc) entre l’aéroport et la gare
centrale de la capitale ka-
zakhe. Pour ce projet, qui sera
réalisé en trois phases, la part
d’Alstom se chiffre à
«plus de
300 millions d’euros»
et com-
prend la pose des voies, la
construction d’un dépôt et
centre de maintenance, l’ali-
mentation électrique, la si-
gnalisation, l’information-
voyageurs, les points de vente
des billets et le matériel rou-
lant («winterisé» pour circu-
ler de -40°C à +40°C). L’en-
treprise de travaux publics
kazakhe AIS sera chargée des
ouvrages de génie civil. La
première tranche du tramway
d’Astana doit entrer en service
en 2014.

La Vie du Rail
– 20 juillet 2011
INTERNATIONAL
Kazakhstan.
Un Citadis «winterisé» pour Astana
Régis CHESSUM
La mise en service du tramway
est prévue pour 2014.
Le maire de Londres, Boris
Johnson, ne soutiendra pas
le projet de liaison ferroviaire
à grande vitesse entre la ca-
pitale et Birmingham, à
170km au nord, baptisée
HS2 (High Speed2), à moins
que la section de Londres
soit entièrement souterraine,
selon une lettre publiée le
3juillet par le
Sunday Tele-
graph.
Mais cela augmenterait for-
tement les délais et surtout
les coûts de construction
alors que c’est le seul pro-
gramme d’infrastructure ma-
jeur (une vingtaine de mil-
liards d’euros) sauvé des
coupes claires budgétaires
du gouvernement de David
Cameron.
Lancée le mois dernier, la
consultation publique a per-
mis de prendre la mesure de
la mobilisation des oppo-
sants au projet. Emmenés
par les défenseurs de l’envi-
ronnement, ils ont trouvé des
appuis auprès d’élus conser-
vateurs dont les circonscrip-
tions rurales seraient traver-
sées par la nouvelle ligne.
Le gouvernement estime
pourtant avoir fait preuve de
prudence en visant un début
des travaux en 2017 pour
une inauguration en 2026.
Birmingham serait alors à
50minutes de Londres,
contre 1h30 actuellement.
L’objectif est, à plus long
terme, de prolonger la ligne
jusqu’à l’Écosse via deux
branches, l’une passant par
Manchester et l’autre par
Leeds.

Allemagne : Deutsche Bahn demande officiellement
à emprunter le Tunnel sous la Manche
Deutsche Bahn a annoncé le 12juillet avoir déposé auprès de la Commission intergouvernementale
(CIG), organisme chargé de la sécurité de l’infrastructure, une demande d’autorisation pour
emprunter le tunnel sous la Manche, sur lequel Eurostar, la filiale à 55% de la SNCF, dispose
actuellement du monopole pour les trains à grande vitesse. La compagnie allemande, qui souhaite
relier Londres en 2013, se dit «optimiste» sur l’obtention d’un aval de principe dès cet été. Une
étape décisive a déjà été franchie le mois dernier avec le feu vert de la CIG à la motorisation répartie
équipant les trains à grande vitesse Siemens, utilisés par Deutsche Bahn mais aussi commandés pour
l’avenir par Eurostar. Ces trains devront encore recevoir d’autres autorisations: ils se présentent en
effet, en général, en deux éléments de 200mètres chacun, ce qui est pour l’heure incompatible avec
la réglementation du Tunnel.

Suisse : les CFF veulent retirer les pendulaires ETR 470
L’incendie d’un ETR470 assurant l’EC12
Milan – Zürich, le 17mai dernier à Ambri-
Piotta (Gothard), a été le
dysfonctionnement de trop pour cette série
de pendulaires peu fiables construite par
Fiat Ferroviaria en 1996-1997 et destinée
au trafic entre la Suisse et l’Italie à des
vitesses supérieures aux trains classiques.
Avec, comme conséquence directe, le
maintien dans l’immédiat, à grands
renforts de frais de fiabilisation, de quatre
des neuf rames propriété des CFF. Leur
radiation définitive ne devrait intervenir
qu’en 2014, faute de matériel international
pour les remplacer.

Le maire de
Londres s’oppose
au projet HS2
Un ETR 470 Milan – Bâle à la
sortie nord du tunnel de base du
Lötschberg à Frutigen.
Alstom Transport / Design & Styling
1883 : le
premier voyage
de l’Express
d’Orient
En 1859, depuis Paris, pour
embarquer sur un paquebot-
poste des Messageries impé-
riales qui quittait Marseille le
samedi en fin d’après-midi
pour Constantinople (l’ancien
nom d’Istanbul), il nous aurait
fallu prendre un train à Paris
gare de Lyon, tôt le vendredi
matin. Tout ça pour arriver
dans la capitale ottomane…
huit jours plus tard, le di-
manche en tout début de ma-
tinée!
En 1893, avec l’amélioration
des horaires des trains express
d’Orient, partant un vendredi
matin de la gare de Strasbourg
(l’actuelle gare de Paris-Est),
trois jours et demi suffisent
pour arriver le lundi en début
d’après-midi à Sirkeci Gar�. En
trente ans, la durée du trajet a
diminué de plus de moitié!
C’est le 5juin1883 qu’a cir-
culé pour la première fois l’Ex-
press d’Orient depuis Paris,
passant par Munich, Vienne,
Budapest, Bucarest. Le train
s’arrêtait à Giurgu, au sud de
Bucarest, car le Danube se
franchissait sur un bac. Côté
bulgare, un autre train emme-
nait les voyageurs jusqu’au
port de Varna sur la mer
Noire, d’où ils prenaient un
vapeur jusqu’à Constantino-
ple. En 1889, avec la liaison
directe jusqu’à Istanbul, la
grande époque de l’Orient-Ex-
press peut commencer.
1884 :
l’ouverture
du Pera Palas
D’autant qu’en 1894 ouvre le
somptueux Pera Palas,
construit par l’architecte im-
périal levantin Alexandre Val-
laury pour la Compagnie in-
ternationale des wagons-lits et
des grands express européens
ou, plus exactement, sa filiale,
la Compagnie internationale
des grands hôtels, fondée par
Georges Nagelmackers.
La première intuition de ce
dernier fut de transformer voi-
tures-restaurants et wagons-
lits, jusqu’alors rajoutés isolé-
ment, en éléments principaux
des trains de luxe, rapides et
confortables, avec des trans-
ferts de bagages et des forma-
lités douanières simplifiées qui
dispensent les voyageurs de
descendre du train pour s’en
occuper.
Mais il avait compris aussi que
ces passagers souhaitaient
trouver, une fois arrivés à des-
tination, des hôtels à la hau-
teur de leur voyage.
Comme l’indique le
Guide du
voyageur en Orient
de 1909, à
son arrivée à Sirkeci, le voya-
geur peut s’allouer les services
d’un «hamal» (porteur) qui
portera à dos d’homme les ba-
gages trop volumineux pour
être chargés dans la voiture où
le voyageur s’installera car,
pour rejoindre Pera Palas, il
faut franchir la Corne d’Or sur
le pont de Galata et monter
jusqu’aux Petits-Champs.
Il faudrait des pages et des
pages pour écrire le florilège
des aventures réelles ou fan-
tasmées de tous les artistes,
écrivains, têtes couronnées, di-
plomates, espions, demi-mon-
daines et autres gigolos, qui
passèrent des voitures bleu et
or au bar style Art Nouveau
du Pera Palas, et inversement.
Comme Greta Garbo, par
exemple, qui arrive en dé-
cembre1924 à Constantino-
ple – elle a 19ans – avec son

La Vie du Rail
– 20 juillet 2011
NOSTALGIE
L’hôtel Pera Palas,
à Istanbul, accueillait les
riches passagers de
l’Orient-Express. Il vient
d’être entièrement
restauré.
Le bar Art Nouveau
du palace, avec sa
décoration faite de
bois précieux, ten-
tures, lustres et tapis
(photo d’archives).
Photos Pera Palace/SP
mentor, Moje Stiller, 41ans,
talentueux metteur en scène
suédois. Ils doivent tourner
L’Odalisque de Smolensk,
triste histoire d’une jeune aris-
tocrate russe qui finit dans le
harem d’un pacha turc.
Installés somptueusement au
Peras Palas, dans la cham-
bre103, ils mènent grande
vie. Le premier amour de
Greta Garbo s’épanouit sous
le ciel du Bosphore. Mais les
factures s’accumulent et
comme le producteur alle-
mand fait faillite, tout s’arrête.
Il faut l’argent des consulats al-
lemand et suédois pour re-
mettre toute l’équipe de tour-
nage dans le train pour Berlin.
Ou bien ce consul des États-
Unis au sujet duquel, en 1921,
le journal
L’Europe Nouvelle
s’inquiète avec humour de sa-
voir si
«son râtelier d’or»
qu’il
s’est fait voler à bord du train
lors d’une attaque de brigands
«ne renfermait aucun secret
d’État»!
Et puis, il y a cet Orient-Ex-
press parti de Paris le 29jan-
vier 1929 en soirée et qui se
retrouvera bloqué par la neige
par 25° sous zéro à Çerkesköy,
pendant plusieurs jours, à
moins de 100kilomètres d’Is-
tanbul.
Le journal
Le Gaulois
explique
qu’on n’a pas trouvé d’avion
muni de skis et que, de toute
façon, il aurait fallu
«l’autori-
sation du gouvernement d’An-
gora [Ankara] pour une telle
opération, la zone militaire étant
interdite aux étrangers».
Plus
de peur que de mal, mais le
train n’arrivera que le… 10fé-
vrier à Sirkeci! À noter que la
voiture n°3344 qui connut
cette
«terrible»
aventure a été
vendue aux enchères en
juin2010.
La Vie du Rail
– 20 juillet 2011

Restauré, l’ascenseur du Pera Palas n’a rien perdu de sa grâce légère.
Photos Pera Palace/SP

La Vie du Rail
– 20 juillet 2011
NOSTALGIE
1919 : le
Simplon-Orient-
Express
À l’issue de la Première Guerre
mondiale, les vainqueurs ont
la volonté de rompre avec l’hé-
gémonie ferroviaire qu’exer-
çaient les empires centraux
(Prusse, Autriche-Hongrie) sur
l’Europe centrale et même
jusqu’au cœur de l’Asie mi-
neure (le Berlin – Bagdad) en
épousant la vallée du Danube,
un sillon de circulation du sud
de l’Allemagne à la mer Noire
(via Vienne, Budapest, Bel-
grade, Bucarest) parcouru par
les Européens depuis la nuit
des temps. Aussi ils ouvrent dès
1919 une nouvelle liaison
«sud», toute consacrée à l’Eu-
rope méridionale, renforçant
les liens encore fragiles avec les
petits pays balkaniques: c’est
le Simplon-Orient-Express, qui
devient l’itinéraire le plus fré-
quenté pour rejoindre Istanbul
depuis Paris (gare de Lyon),
Lausanne, Simplon, Venise,
Belgrade, Sofia. Une corres-
pondance directe est possible
avec Calais et l’Angleterre via
une jonction gare du Nord –
Petite Ceinture – gare de Lyon.
Pas « un » mais
« des » Orient-
Express
Plus que de l’Orient-Express, il
faudra donc désormais parler
«des» Orient-Express, avec
un maillage ferroviaire reliant
toutes les capitales euro-
péennes. Car d’autres lignes
sont mises en place comme
l’Ostende-Vienne Express (via
Bruxelles, Cologne, Nürem-
berg, Vienne… Istanbul);
l’Arlberg Orient-Express (via
Zürich, Innsbruck, Vienne…
Istanbul); le Tauern-Orient-
Express (via Berlin, Münich…
Istanbul). À partir des années
1920, un délégué turc parti-
cipe aux conférences d’har-
monisation du Simplon-
Orient-Express, car la
Compagnie des wagons-lits a
l’intention de prolonger cette
dynamique ferroviaire bien au-
delà des Balkans, vers Ankara,
la nouvelle capitale anato-
lienne, la Syrie, la Palestine,
l’Iran, l’Arabie. Cela se concré-
tise en 1930 avec l’ouverture
du Taurus-Express, reprenant
finalement le trajet du Berlin
– Bagdad depuis Haydarpacha
Gar�, côté Asie (Haydarpacha
Gar�, dont la toiture a été ra-
vagée par un incendie en no-
vembre2010, mais qui reste
ouverte aux voyageurs). C’est
l’époque où l’on se prend à rê-
ver d’un tour du monde fer-
roviaire sans changer de train.
Qu’importent les mers, on
creusera les tunnels néces-
saires! D’ailleurs, sous l’im-
pulsion des Orient-Express,
on ressort le projet du tunnel
sous la Manche et on com-
mence à parler d’un tunnel
sous le Bosphore, dont on dit
qu’il pose plus de problèmes
financiers que techniques
(c’est en 2013 que devrait ou-
vrir Marmaray, ce tant attendu
tunnel sous le Bosphore, des-
tiné aux trains de banlieue ex-
clusivement).
Après 1939-45,
fini le luxe
En 1929, à l’occasion d’un
grand reportage sur «Les Bal-
kans Nouveaux», un journa-
liste de la
Revue des Deux
Mondes
n’est pas tendre avec le
Simplon-Express et l’Express-
Orient qu’il réduit à de
«vieux
wagons-lits, à peu près vides, fort
mal attelés à un convoi de mar-
chandises»,
tout en se plai-
gnant de ces
«frontières héris-
sées»,
«polices
soupçonneuses»,
«douanes
tracassières»!
Dans son droit
de réponse, M.Margot, direc-
teur général de la Compagnie
internationale des wagons-lits,
a à cœur d’expliquer que bien
des aspects, par exemple les
formalités douanières, relèvent
de la responsabilité des États
et non des réseaux ferroviaires.
Il reconnaît que, malgré l’or-
ganisation régulière de confé-
rences pour optimiser l’exploi-
tation, il est toujours possible
qu’entre
«Salonique et Sofia,
quelque circonstance fortuite en-
traîne un voyage dépourvu du
confort auquel s’attend le voya-
geur d’un train de luxe».
La Se-
conde Guerre mondiale porte
un coup mortel à cette belle
mécanique ferroviaire qui per-
mettait d’atteindre Istanbul en
60heures. L’Orient-Express
reste à quai dès la déclaration
de guerre. Le Simplon-Orient-
Express, lui, circulera vaille que
vaille jusqu’en 1942. Après le
conflit mondial, ce sera l’es-
soufflement. Dans les ruines de
Sur cette carte postale
ancienne, la gare de Sirkeci
Gar� (côté européen). De
style oriental et décorée
de faiences, elle fut ouverte
en 1890 pour accueillir
l’Orient-Express.
À la gare de l’Est,
à Paris, quelques
minutes avant le
départ…
Archives PHOTORAIL
VAUSSY/PHOTORAIL
La Vie du Rail
– 20 juillet 2011

n chemin de fer entre ciel et mer
Le Chemin de fer
de la baie de Somme
Maurice Testu.
Éditions La Vie du Rail.
160 pages. 49 euros. En vente à la Boutique.
Par correspondance (+ port : 7 euros)
à La Vie du Rail 11, rue de Milan 75009 Paris.
Réf.: 110 244.
Ou en ligne www.laviedurail.com
Dominique PARIS

La Vie du Rail
– 20 juillet 2011
BONNES FEUILLES
La 030 T Corpet de la râperie de
Lanchères au travail : sur la
première photo, on la voit
traverser la cour de la gare avec
une rame apportée par un train
de la SE et se diriger vers la
râperie sur la voie
d’embranchement ; la seconde
photo montre la rencontre entre
cette machine et le locotracteur
du réseau de la Somme à la
soudure de l’embranchement, en
gare de Lanchères-Pendé.
Ci-dessus : l’autorail De Dion
type NR, immatriculé M 21, plus
confortable que les spartiates NJ,
grâce à ses bogies, a été muté du
réseau breton en 1940 avant de
finir sa carrière dans un incendie
en 1958. On voit ici cet engin
à Cayeux.
La Vie du Rail
Renaud/Pérère/Collection CFBS
La Vie du Rail
– 20 juillet 2011

À Noyelles, départ simultané des trains pour Le Crotoy (loco Corpet-Louvet Aisne n° 1 et voitures suisses) et pour Saint-Valery
(loco Buffaud-Robatel n° 3714 et voitures en bois).
Daniel Descroix, dit «la pipe», au manche de la Bretonne en mai 2010.
Testu
Pendant près de dix ans après
l’âge de la retraite, Marcellin a
fréquenté assidûment le dépôt de
Saint-Valery pour aider les
salariés à la restauration de la
130 Haine-Saint-Pierre, de la
031Buffaud et de la 130 Cail. On
le voit ici en 2009 au manche de
la 230 du réseau breton.
Testu

Un kilométrage
revenu à
la consistance
des années
En schématisant et en simpli-
fiant, on peut considérer que le
réseau français s’est constitué,
pour l’essentiel au cours du
XIX
siècle, à peu près en trois
grandes étapes: les grandes ra-
diales, les transversales et an-
tennes de complément impor-
tantes, ces deux étapes s’étalant
sur les décennies 1840 à 1870,
puis enfin les lignes secondaires
réalisées en majeure partie au
cours des années 1880 et 1890.
En tout dernier lieu, à la char-
nière des XIX
et XX
siècles est
venu s’ajouter le réseau capil-
laire des chemins de fer dépar-
tementaux d’intérêt local,
constituant en quelque sorte
une quatrième étape. Dans un
volume forcément limité, nous
n’inclurons pas ce réseau dans
l’étude qui va suivre.
Dès 1914, la mobilisation gé-
nérale a interrompu les chan-
tiers et différé les projets. Après
le conflit, la poursuite des ou-
vertures se fait à un rythme ex-
trêmement ralenti et l’on est

La Vie du Rail
– 20 juillet 2011
LE DOSSIER
Réseau.
Lesfermetures d
À son apogée dans les années 1920, le réseau français a commencé à régresser au cours de
la décennie suivante pour revenir de nos jours au niveau qui était le sien dans les années
1880. Évolution que l’on retrouve, plus ou moins affirmée, chez nos voisins, mais qui
n’avait pourtant rien d’inéluctable si l’on en juge par la Suisse, qui, en apportant, en temps
voulu, les améliorations nécessaires, a pu préserver un maillage fin de son territoire.
Alors qu’aujourd’hui se pose la question du devenir du rail français, voici un état des lieux
historiques des fermetures de lignes sur deux numéros, en commençant par les lignes
d’intéret général et les lignes voyageurs.
F. Fénino
Un autorail U 150
vu entre Lalevade
et Vals-les-Bains
(juin 1965).
La Vie du Rail
– 20 juillet 2011

e lignes d’intérêt général
1920
LIGNES D’INTÉRÊT GÉNÉRAL OUVERTES
AU SERVICE VOYAGEURS
LIGNES D’INTÉRÊT LOCAL
LIGNES D’INTÉRÊT GÉNÉRAL « SV »
(sans voyageurs, ouvertes
au seul trafic fret)
Ralentissement
de lignes
Guerre mondiale
Décrets de
1938-1939
(fermeture aux
Vague de
transferts sur
1967-1973
(fermeture aux
Les lignes ouvertes uniquement
au service fret proviennent des
fermetures de lignes au service
voyageurs
Remontée en
à partir de 1981 :
peu de fermetures
des réouvertures
ÉVOLUTION DU RÉSEAU FERRÉ
En 2009, le réseau RFF comprend 29 213 km
dont 24 367 km ouverts au trafic voyageurs.
La longueur du réseau d’intérêt local
est devenue négligeable (70 km).
Fermeture de nombreuses
lignes secondaires fret
À son apogée, à la fin des années 1920,
le réseau ferré français comprend plus de 63 000 km
Infographie D. PARIS/Historail
Ligne fermée
à tous tra�cs
Ligne à voie étroite
fermée à tous tra�cs
Ligne en cours
de réouverture
au service voyageurs
Ligne rouverte
au service voyageurs
Ligne rouverte
au service fret
Ligne fermée
au service voyageurs
et ouverte au fret
Infographie Vincent Morell/Historail
parvenu à l’apogée du réseau
ferré au cours des années 1920,
avec plus de 40000 km de
lignes d’intérêt général et plus
de 20000 km de lignes d’inté-
rêt local.
Dès les années 1930, le réseau
commence à régresser, avec
une forte accélération en fin de
décennie, avec la fermeture au
trafic des voyageurs des lignes
au potentiel le plus faible, celles
ouvertes les dernières et qui
ont, de ce fait, eu des durées
de vie très courtes, souvent des
lignes achevées entre 1900 et
la guerre de 1914-1918, voire
dans les années 1920, le record
étant atteint par Carmaux –
Vindrac, ouverte en 1937 et
emportée dès 1939 dans la
tourmente des décrets de coor-
dination. Les années 1930 sont
également marquées par la fer-
meture d’une part importante
du réseau d’intérêt local, qui a
déjà perdu les deux tiers de son
kilométrage à la veille de la Se-
conde Guerre mondiale.
Après le sursaut durant le
conflit 1939-1945, où le rail est
seul à assurer les transports,
justifiant plusieurs réouver-
tures, le mouvement des fer-
metures reprend doucement
dans les années 1950 pour les
lignes d’intérêt général tandis
que disparaît ce qu’il restait des
réseaux départementaux. Les
lobbies routiers, qui avaient
déjà obtenu la suppression de
l’énorme réseau des tramways
avant guerre, et qui clamaient
que le rail avait fait son temps,
semblent être de plus en plus
entendus par les pouvoirs pu-
blics. Tout va s’accentuer entre
la fin des années 1960 et le dé-
but des années 1970 et l’on
imagine bien le chemin de fer
cantonné aux trains de mar-
chandises, comme aux États-
Unis. Ensuite, avec le choc psy-
chologique de la crise pétrolière
de 1973, le mouvement se ra-
lentit et le kilométrage de voies
ferrées connaît une relative sta-
bilité, les lignes à grande vitesse
et quelques réouvertures com-
pensant les cessations d’ex-
ploitation.
Aujourd’hui, le kilométrage de
lignes de chemin de fer est
ainsi revenu à peu près à ce
qu’il était au début des années
1880, mais avec une physio-