Description
3443
27 novembre 2013
HEBDOMADAIRE
FRANCE 2,50
BELGIQUE 2,85
SUISSE 4,80 FS
T
endron de veau et chutney
de prunes dans un bocal
tendance signé d’un chef étoilé,
ravigotante et copieuse salade
de lentilles vertes au saumon
fumé sauce gravlax, viennoise-
ries cuites le matin même,
fruits frais découpés prêts à pi-
corer, soupe de légumes, pe-
tites spécialités artisanales à gri-
gnoter… Du beau, du bon, du
sans gluten, du végétarien
aussi. Et 30% de bio.
Consciente que les attentes des
voyageurs ont bien changé, la
SNCF fait quasiment table rase
et déploie depuis le 4novem-
bre une nouvelle offre de res-
tauration ferroviaire. La carte
devrait donner aux voyageurs
le goût de fréquenter plus
nombreux les voitures-bars, de
se faire servir un vrai repas à
sa place dans le TGV.
On le sait, sur quelque 17mil-
lions de voyageurs TGV et
Restauration ferroviaire.
La SNCF
se met derrière le comptoir
La Vie du Rail
– 27 novembre 2013
Monop’ Daily, Paul et les autres. La SNCF a embarqué des enseignes à succès pour concocter sa
nouvelle offre de restauration ferroviaire. Des marques qui, ayant déjà remporté les suffrages des
consommateurs en ville, devraient aussi aiguiser l’appétit d’une clientèle nouvelle dans les voitures-
bars des TGV. Une nouvelle Unité Restauration, intégrée à SNCF Voyages assume désormais
directement les choix offerts et le suivi.
PROJECTEUR
Sur Alleo: le goût allemand s’impose
Sur Alleo, les trains exploités en coopération par la SNCF et la DB,
il fallait une offre intégrant les habitudes alimentaires des deux
pays. Il semble que le goût allemand l’ait plutôt emporté. Du petit
en-cas au repas complet on a tenu compte de la prédilection de nos
voisins pour le roboratif sandwich, les pâtisseries ou encore les
fameux bretzels. La nouvelle offre leur propose aussi une formule
apéritif « happy hour ». Une tireuse à bière pression est installée
au bar.
Au départ et à l’arrivée de Paris, pour cette clientèle internationale,
en première classe, les repas sont servis à la place. Ils sont inclus
dans le prix du billet. Pour les clients des Marseille – Francfort:
un plateau collation est à passer prendre au bar.
La Vie du Rail
– 27 novembre 2013
grandes lignes, seuls 16 à 18%
consomment à bord. Pour ré-
veiller leur appétit, la SNCF
mise sur des enseignes dont le
succès est déjà reconnu.
« Nos
clients aiment les marques. Cela
les rassure. Ils peuvent les re-
trouver à bord comme dans les
gares »
, explique Barbara Dali-
bard, la directrice générale de
SNCF Voyages. Et puisque le
TGV, c’est la France, l’idée c’est
aussi de faire du train un am-
bassadeur qui véhicule un peu
de ce que la vie française a de
bon. Pour cela, la SNCF em-
barque dans l’opération l’en-
seigne de restauration urbaine
rapide Monop’ Daily qui offre
15 de ses références; les plats
cuisinés des restaurants Bio
Boco; les cafés du torréfacteur
de Trieste Illy; Paul, le bou-
langer du Nord, maison créée
en 1889 qui a fait fortune à Pa-
ris; les thés de la Compagnie
Coloniale et même les fameux
chocolats Angelina (le choco-
latier de la rue de Rivoli où al-
lait Marcel Proust). Et puis les
smoothies Innocent (des mix
de fruits et yaourt à boire très
au goût du jour). À noter aussi
quantité de petites gourman-
dises régionales à découvrir ou
redécouvrir: calissons et can-
nelés, galipotes de Poitou-Cha-
rentes, läckerwilly du Jura…
« Le client aime être surpris »
poursuit Barbara Dalibard.
« La
carte sera renouvelée quatre fois
par an»
. Et c’est une coentre-
prise Newrest Wagons-lits et
Elior qui assure les opérations.
Newrest Wagons-Lits est déjà
acteur à bord des TGV Alleo
(DB-SNCF), des TGV Lyria
mais aussi à travers l’Europe en
Autriche et au Portugal. L’en-
treprise de Toulouse trouve là
le plus gros marché de son his-
toire. Olivier Sadran, son pré-
sident, assure qu’elle ne
compte pas s’arrêter en si bon
chemin et se met maintenant
sur les rangs pour décrocher
des marchés à bord de Thalys,
Eurostar… Quant aux trains
de la Renfe, l’entreprise ironise
sur le fait que le marché qui
l’intéressait a été attribué à un
spécialiste… du bâtiment.
Elior, pour son compte, a bâti
sa réputation sur le marché de
la concession, notamment
dans les gares et les aéroports.
Il apporte sur un plateau ces
fameuses marques.
C’est bien beau tout ça mais,
dira le voyageur, ça coûte for-
cément plus cher? On le sait, il
trouve toujours
a priori
l’addi-
tion gratinée. Non, estime Bar-
bara Dalibard qui argumente:
le prix de l’expresso (un as-
semblage exclusif de purs ara-
bicas) que propose maintenant
Illy à la place de Lavazza reste
à 2,50euros. Celui du best-sel-
L
a SNCF se met aux fourneaux. Et en maîtresse de maison,
elle veut désormais avoir l’œil à tout. Consciente que la restau-
ration ferroviaire constitue un véritable enjeu d’image, plutôt que
la déléguer entièrement les yeux fermés à un prestataire exté-
rieur, elle a créé une nouvelle Unité Restauration, intégrée à
SNCF Voyages, filiale à 100% de l’entreprise avec sa tête Sophie
Grimaldi. C’est désormais la SNCF elle-même qui choisit, achète
et vend,
via
Newrest, les produits proposés à bord. Et elle pilote
toutes les prestations jusqu’à la dotation de chacun de ses trains.
Une manière aussi d’assumer aux yeux du client.
Sans reparler de l’indécollable sandwich SNCF qui appartient
quasiment à l’imaginaire collectif, il faut dire que les voyageurs
continuaient d’avoir la dent dure contre la restauration à bord.
Gildas Le Gouvello, représentant de la CFDT Restauration, in-
siste:
« Il fallait tirer les leçons du contrat précédent. On était dans
une impasse dont il fallait sortir par le haut »
. Comment? En pas-
sant d’une logique d’économie globale, lourde en frais fixes, à
« une logique de service donc à une meilleure maîtrise des coûts »
, ex-
plique Barbara Dalibard. La SNCF jusqu’ici compensait chaque
année par une manière de subvention le déficit du prestataire,
l’italien Cremonini, qui officiait seul depuis 2009.
L’idée de faire émerger du nouveau mijotait depuis avril 2012.
Ce printemps-là, la SNCF, pour alimenter ses réflexions, lance
un appel à idées auprès d’une vingtaine d’entreprises de la res-
tauration, du design et de la distribution. Le nouvel appel d’of-
fres a finalement découpé cette fois le gâteau en trois parts: un
lot portant pour le marketing remporté par la co-entreprise
Newrest-Elior, qui se voit aussi attribuer la restauration sur Al-
leo, la filiale commune de la SNCF et de la DB; enfin un lot, le
plus important, remporté par Newrest qui assure l’exploitation
des bars TGV et comprend la gestion des personnels.
L’avitaillement des rames reste assuré par Avirail (500 salariés),
détenue à parité par Geodis et Cremonini.
Ch. B.
Un enjeu d’image
SNCF Voyages (Barbara Dalibard, au centre) a lancé sa nouvelle offre
de restauration à bord des TGV en présence d’Olivier Sadran (président
de Newrest) et de Jean-François Camarty (DGA d’Elior Concessions).
Photos SNCF François Objois
© Eric Morency / SNCF Voyages
(Suite page 8)
ler qu’est le croque-monsieur
(800000 « exemplaires » ven-
dus par an), dont la recette a
été retravaillée, est toujours à
6,20euros.
Ce qui change, c’est une four-
chette de prix plus large pour
satisfaire tous les budgets.
Grâce notamment à des for-
mules tout compris. Un petit
déjeuner expresso +un crois-
sant à 3,90euros, ou plus
complet à 6,20 et 8,20euros.
Et trois formules déjeuners:
depuis 8,30euros (le prix d’un
ticket restaurant) pour la for-
mule Daily Malin jusqu’à
13,90 pour le menu Daily
Gourmand avec plat cuisiné
chaud comme le risotto aux
champignons ou les raviolinis
aux trois fromages actuelle-
ment à la carte. En passant par
un menu Daily Saison à 10,90
offrant le choix entre quiche,
croque, salade composée du
moment ou sandwich wrap.
Toutes trois avec un choix de
desserts et de boissons.
Mais on peut aussi se faire vrai-
ment plaisir, avec le menu
Boco: plat cuisiné d’un chef
étoilé et dessert d’un grand pâ-
tissier +une boisson. Le prix?
17euros. Une petite révolu-
tion que ces plats en verrine
(recyclable) à consommer
froids ou qui se réchauffent en
1 minute 30 au micro-ondes.
Ils font monter à bord à la fois
esprit bistrot, exigence bio et
signatures gastronomiques
(voir page 6)
Le voyageur
exigeant se voit ainsi proposer
un taboulé rose à l’hibiscus,
crevettes en gelée orange et po-
melo mitonné selon une re-
cette d’Emmanuel Renaut,
le triple étoilé de Megève, ou
l’épaule d’agneau au colombo
d’aubergines et figues du chef
de
La Côte Saint-Jacques
à Joi-
gny, Jean-Michel Lorain… On
en passe et des tout aussi allé-
chants. Et pour finir la crème
caramel au beurre salé du pâ-
tissier du
Plaza Athénée
, Chris-
tophe Michalak, ou la mousse
au chocolat et copeaux noirs
de Frédéric Bau, le créateur de
Valrhona. Quatre menus qui
roulent et vont changer tous
les 15 jours. Des plats qu’on
peut naturellement déguster
aussi en service à la place en
première classe. L’offre spéci-
fique Pro Première a été soi-
gnée avec une collation de
bienvenue offerte. Là où la
concurrence avec l’avion est
parfois en jeu, il s’agit de pro-
poser aux professionnels qui
voyagent des pauses-plaisir. Le
plateau petit déjeuner est servi
jusqu’à 10h comme à l’hôtel
avec des petits plus: smoothie,
petit sablé. Et pour le déjeuner
elle propose l’élégant coffret re-
pas Boco entrée +dessert
+café à 21euros.
Côté SNCF, l’activité restaura-
tion ferroviaire est chronique-
ment déficitaire. Mais, s’ils ne
consomment pas tous, loin de
là, les voyageurs y tiennent.
Alors pas question d’y renon-
cer.
« Les clients ont dépensé
16millions d’achats dans les
TGV en 2012 »
, rappelle Bar-
bara Dalibard qui assure:
« Quand le client consomme
quelque chose, on en paye
presque un tiers »
. Une semaine
après le lancement de la nou-
velle carte, selon la SNCF, les
premiers chiffres de vente
étaient bons.
Chantal BLANDIN
La Vie du Rail
– 27 novembre 2013
PROJECTEUR
Les personnels
changent
de crémerie
Cremonini ne remettra pas
le couvert mais les
personnels qu’employait le
prestataire italien sont passés
directement, comme prévu
par leur convention collective,
dans le giron de Newrest. Soit
quelque 1700 commerciaux
de bord assurant la vente
en voiture-bar et le service
à la place (qui rejoignent les
personnes travaillant déjà
chez Newrest sur le TGV Est)
mais aussi vendeurs
ambulants sur les Intercités
et personnels travaillant sur
Lunea. Des commerciaux qui,
sur les TGV, semblent
ne pas regretter leur ancien
employeur italien.
Selon Gildas Le Gouvello,
représentant CFDT
Restauration, ils affichent
même leur enthousiasme
pour la nouvelle gamme.
« C’est copieux, bien
présenté et ça sent bon ».
« On est vraiment passé à
l’étage supérieur »
a-t-il relevé parmi les propos
des employés.
Rappelons que ces
personnels de bord avaient
manifesté plusieurs fois leur
mécontentement commençant
très vite par une grève
de 26 jours en mai2009 peu
après l’arrivée du nouveau
prestataire remplaçant,
Wagons-Lits, et faisant grève
une bonne dizaine d’autres
fois depuis pour dénoncer
des conditions de travail
dégradées mais aussi…
de perpétuelles ruptures de
stocks ne leur permettant pas
de répondre aux demandes
des voyageurs.
UN CHIFFRE
– 15%
C’est la réduction sur la note
proposée à bord des voitures-
bars aux détenteurs
de la carte SNCF Jeune,
Senior ou Week-end.
Outre un personnel de bord rhabillé
dans le style brasserie: tenue noir
et blanc, tablier gris et noir… au fur
et à mesure des rénovations de
matériels, le prototype de nouvelle
voiture-bar sera déployé
progressivement. Ambiance
lumineuse repensée, matériaux
plus chaleureux comme le bois et
l’ardoise, vitrine produits agrandie,
machines spécifiques expresso Illy,
mini kiosque à journaux proposant
de nouveaux titres comme
Courrier
international
et mêmes BD ou
le dernier Prix SNCF du polar.
Des voitures-bars plus accueillantes
L’activité restauration ferroviaire
est déficitaire. Mais, s’ils ne consomment
pas tous, les voyageurs y tiennent
© Eric Morency / SNCF Voyages
(Suite de la page 5)