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Description

3277
22 septembre 2010
HEBDOMADAIRE
FRANCE 2,50
BELGIQUE 2,85
SUISSE 4,80 FS
INNOTRANS 2010 À BERLIN
En vitrine
au salon
des nouveaux
trams
www.laviedurail.com
La Vie du Rail
– 22 septembre 2010
À la une…
Photo de couverture
Tram Avenio de Siemens.
� Projecteur
À lire. La SNCF au tournant de la concurrence
Une semaine
dans La Vie du Rail
Informatique SNCF. Des bugs dans
la réorganisation
p. 10
Voyages-sncf.com. Un été satisfaisant
p. 12
Toulouse – Narbonne. Un site Internet
sur le projet
p. 13
Fret SNCF. Un bilan positif pour Pierre Blayaup. 14
Europe. Dominique Bussereau souhaite
un « Airbus du rail »
p. 16
France – Russie. Lancement d’une liaison
Moscou – Nice
p. 17
� Région
Aquitaine. En Médoc, nouveau départ pour la gare
de Lesparre
Centre. Alstom retenu pour le tram de Tours
�La vie des associations
� Les programmes télé
� Salon
Innotrans 2010. Les constructeurs de tramways
renouvellent leurs offres
�Sport
�Jeux
�Petites annonces
�Agenda
� sommaire
Photos de la couverture : Siemens et du sommaire :Philippe HÉRISSÉ
téléphonez au
01 49 70 12 39
10h 00 à 19 h 00
du lundi au vendredi
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de 9 h à 17 h 30
du lundi au vendredi
téléphonez au
08 1102 12 12
N° Azur, au coût d’un appel local,
de 9 h à 17 h 30 du lundi au jeudi et de 9 h à
16 h le vendredi
POUR TELEPHONER A LA VIE DU RAIL
téléphonez au 01 49 70 12 04
C’est le nombre de postes à pourvoir
d’ici 2012 à la compagnie privée ita-
lienne, NTV, qui recrute depuis le
15septembre son personnel opéra-
tionnel, de bord et d’accueil.
À SUIVRE
L’ANECDOTE
Madonna change de train de vie
Elle voulait peut-être savoir à quoi ça ressemble. Abonnée aux limousines, la
chanteuse Madonna a été vue il y a quelques jours, comme n’importe quelle
voyageuse de base… dans le métro de New York.
Métro de Toulouse. Trop
d’accent tue l’accent.
Tisséo va revoir ses
annonces du nom des
stations de métro à
Toulouse en occitan.
L’initiative date d’il y a
un an et, déjà, elle
indispose certains
voyageurs. En dehors du
volume sonore jugé
agressif, c’est
principalement l’accent
exagéré au point de tomber
dans le grotesque qui est
critiqué par les voyageurs
enquêtés.
Le métro toulousain va donc
tout remettre à plat en
préférant la qualité à la
quantité.
Inde. Alstom à Madras.
Chennai Metro Rail Ltd a
signé avec Alstom un
contrat de 243millions
d’euros pour la fourniture
de 42rames de 4voitures
de métro. Premières
livraisons en 2012.
Devenue Chennai, l’ex-ville
de Madras, sur la côte sud-
est de l’Inde, compte
8millions d’habitants.
Elle développe un projet de
métro de 45kilomètres et
32stations depuis 2007.
RUE DU COMMANDANT
CHUCHOTE
Mireille Faugère au
chevet de l’Assistance
publique
Mireille Faugère, ancienne pa-
tronne de SNCF Voyages, pour-
rait prendre la tête de l’Assis-
tance Publique – Hôpitaux de
Paris (AP – HP) à la place de Be-
noît Leclercq. Le 13septembre,
le site du
Quotidien du médecin
annonçait une nomination en
Conseil des ministres pour le 15
ou le 22septembre. Elle n’est pas
intervenue le 15. Mais la piste
semble sérieuse. Si la nomina-
tion est confirmée, Mireille Fau-
gère, qui avait veillé aux desti-
nées d’un TGV en belle santé, va
devoir se pencher sur une AP en
pleine crise.

La Vie du Rail
– 22 septembre 2010

Septembre 2009. Fret: le discours
passe au vert
« Le ministre de l’Écologie et du Développement durable, père
porteur du Grenelle, veut annoncer lui-même sa
«nouvelle poli-
tique publique de la mobilité des marchandises».
Normal. De son côté,
la SNCF sait qu’elle aura du mal à convaincre ses publics: les sa-
lariés et l’encadrement, qui ont déjà vu échouer cinq plans fret, les
syndicats, qui calculent le nombre probable de suppressions de
postes. Les concurrents vont vérifier, soupçonneux, si le programme
annoncé ne pourrait pas, par hasard, être dénoncé à Bruxelles. Les
PME clientes, qui redoutent de perdre en même temps que le wa-
gon isolé un moyen de transport dont elles ne paient qu’une partie
du coût réel, astiquent les mégaphones pour hurler que la SNCF
«va jeter des milliers de camions sur les routes».
Relayées par les élus
régionaux, qui vont bientôt entrer en campagne. Il va falloir trou-
ver les bons mots.
(…)
Le thème du message est qu’on travaille, sur la durée, à mettre
moins de marchandises sur les camions et davantage sur les trains.
François Regniault est un observateur privilégié des plus hauts étages du siège
de la SNCF. Bien placé à la direction pour prendre le pouls à l’intérieur d’une
entreprise en pleins chamboulements, il avait conservé dans le titre de son
précédent ouvrage, couvrant la première année de présidence de Guillaume
Pepy, la forme interrogative:
SNCF, la mutation impossible?
Cette fois, inutile
de s’encombrer d’un point d’interrogation pour titrer:
SNCF, la fin d’un
monopole.
Puisque ce monopole-là vit ses derniers mois. Le présent de
l’entreprise, c’est la fin de la belle croissance du TGV, le renoncement aux
grandes commandes de rames, un train sur dix en retard, et de longues années
de travaux sur les voies qui ne devraient rien arranger. Quant à l’avenir,
s’annoncent déjà le Paris – Bruxelles à l’allemande, le Paris – Marseille à l’italienne… Les
adaptations nécessaires à l’arrivée en tous secteurs de la concurrence, les mutations obligées,
souvent compliquées et chaotiques à mettre en œuvre dans une entreprise souvent plombée par ses
lourdeurs historiques… François Regniault passe tout en revue. Sans l’excessive complaisance à
laquelle pourrait l’inciter sa fonction, à la direction de l’entreprise. Sans, non plus, que l’ouvrage
corresponde vraiment au titre de la collection:
«Coup de gueule».
Tout comme son précédent livre
n’avait rien du «portrait au vitriol de Guillaume Pepy» dont fait état le communiqué de presse.
Un temps chargé du journal interne de l’entreprise, François Regniault a été auparavant vingt ans
journaliste dans la presse économique, principalement
Les Échos
et
La Tribune
. Et son livre tient du
mélange de ces genres: l’envie naturelle d’expliquer le fonctionnement de l’entreprise, celle de mettre
en exergue ses dysfonctionnements. L’intérêt de l’ouvrage, c’est donc bien la proximité de l’auteur
avec les lieux où se prennent les décisions majeures. On y découvre les dessous de la réforme du fret,
mettant aux prises ministre et direction, ou ceux des dernières grèves, les leaders syndicaux et les
responsables des Ressources humaines.
Il nous fait aussi entrer aussi, sans que l’on n’en sache véritablement les raisons profondes, dans les
coulisses du départ de Mireille Faugère, l’ex-patronne du TGV, départ qui fut un véritable choc au
sommet de l’entreprise. François Regniault croque au passage en quelques lignes les fins portraits de
personnages majeurs et souvent dans l’ombre, au fil de ce livre au style direct, sans fioritures,
enlevé. De quoi découvrir derrière les grands enjeux, les anecdotes et la petite histoire dont il se plaît
à être le témoin quotidien. Nous vous proposons quelques bonnes feuilles du livre qui paraît ce jour.
Pascal GRASSART
SNCF, la fin d’un monopole. François Regniault. Éditions Jean-Claude Gawsewitch (JGC). 18,90euros.
PROJECTEUR
À lire.
La SNCF au tournant de
C’est ce que demande la société
française. On renonce pour cela
à plus de la moitié du système
du wagon isolé, moyen inadapté
à l’objectif, et on investit dans
les techniques du futur, pro-
metteuses. Autour de Bernard
Emsellem, directeur général dé-
légué à l’Écomobilité et à la
Communication, on choisit les
meilleures images pédago-
giques: quand on a inventé le
micro-ondes, il a bien fallu ar-
rêter de produire à tout va des
fours à résistance électrique. Ou,
plus moderne: quand arrive le
web 2.0, le Minitel s’efface. Il
faut évacuer les mots usés pour
adopter le vocabulaire du re-
nouveau. »

La leçon
anglaise
« La SNCF a été créée en 1938
parce que les compagnies pri-
vées ne parvenaient pas à équi-
librer leur exploitation, mais il
y a des exemples beaucoup plus
récents. Prenons les Britan-
niques. MmeThatcher et son
successeur, John Major, ont cru
que si leur système ferroviaire
coûtait beaucoup d’argent à
leurs contribuables, c’était à
cause des cheminots anglais qui
ne savaient pas gérer le système.
Ils ont donc fait appel au secteur
privé. Après des expériences catastrophiques, ils ont compris que
pour avoir un réseau moderne, qui réponde aux besoins de la po-
pulation, il faut y mettre beaucoup d’argent public. Ils ont rena-
tionalisé le réseau. Aujourd’hui, la Grande-Bretagne est l’un des
pays qui met le plus d’argent par kilomètre de voie dans son sys-
tème. »

Le voyageur fait les frais de l’état
du réseau
« Hormis les lignes à grande vitesse, le réseau français souffre de
plusieurs décennies de sous-investissement. Il est dans un tel
mauvais état qu’à certains endroits les trains roulent à vitesse ré-
duite, pour des raisons de sécurité. La maintenance ordinaire re-
vient parfois à coller des rustines sur une chambre à air cent fois
crevée. On sait tout cela depuis longtemps. Le rapport que Louis
Gallois avait demandé à l’École
polytechnique de Lausanne, qui
avait établi ce bilan dramatique,
date de 2005. Dominique Per-
ben, ministre des Transports de
l’époque, avait annoncé un pre-
mier plan de rattrapage en
mai2006. Trois ans plus tard,
Jean-Louis Borloo a remis plu-
sieurs milliards sur la table pour
aider le transport de marchan-
dises.
C’est une bonne nouvelle, no-
nobstant le fait que la quantité
de travaux en cours sur le ré-
seau est l’une des principales
raisons des retards subis par le
voyageur: il paie aussi au-
jourd’hui, avec son temps
perdu, la mauvaise gestion de
l’infrastructure ferroviaire pen-
dant les décennies avant lui.
Double peine qui n’est pas près
de s’éteindre.
Les travaux lourds et les retards,
on en a encore peut-être pour
une dizaine d’années. Le temps
des travaux d’infrastructure
n’est pas celui d’Internet. Bref, il
faut beaucoup d’euros, pendant
longtemps. »

RFF – SNCF:
le grand
marchandage
« RFF dit: vous, SNCF, pour-
riez avoir une politique com-
merciale plus active, remplir davantage vos trains, augmenter vos
tarifs. Ce que vous nous versez en péages, nous vous le retournons
pour payer l’entretien des rails et la circulation des trains que
nous vous demandons d’assurer, faites-nous donc des travaux
moins chers et les péages baisseront. Les péages servent à amé-
liorer le réseau et à l’agrandir, plus il y a de trains, plus le sys-
tème approche de son équilibre. Et si vous ne savez pas faire cir-
culer des trains rentables, les concurrents sauront le faire.
La SNCF dit: nous sommes d’accord pour payer des péages, mais
pas autant. Vous, RFF, devez respecter un équilibre entre vos am-
bitions et notre capacité à fonctionner. Avec votre programme,
le TGV ne gagnera plus d’argent dès 2011. Quand on sait à quoi
sert l’argent gagné par le TGV, c’est un problème pour toute la
SNCF. Nos tarifs ne sont pas élastiques, nos TGV sont déjà pleins
à 77%, et bourrés le week-end. Nous ne pouvons plus acheter de
nouveau matériel. Là où les péages sont trop élevés, on ne mettra
La Vie du Rail
– 22 septembre 2010

la concurrence
François Regniault.
Conseiller éditorial à la direction SNCF.

La Vie du Rail
– 22 septembre 2010
PROJECTEUR
pas de train. Nous n’allons pas créer des trains déficitaires. Et vous
avez tort de solliciter les conseils régionaux pour le financement de
lignes à grande vitesse, car ils vont demander des trains que nous
ne mettrons pas, parce que vos péages sont trop lourds. »

Problèmes
de trains difficiles
à résoudre
« En vingt mois à la présidence de la SNCF, Guillaume Pepy a été
enfermé vingt fois dans la quadrature du cercle: rester une admi-
nistration et devenir une entreprise. Les exemples sont nombreux,
en voici un facile: dans les airs, Air France-KLM a supprimé la
plupart de ses relations domestiques sans émeute chez les inter-
nautes. Décision rationnelle pour la compagnie aérienne car, depuis
le TGV, son client s’est fait rare sur ses lignes intérieures. Sur les
rails, de temps en temps, l’idée transpire que certaines dessertes
pourraient être réduites parce qu’il n’y a trop peu de voyageurs
dans le train, où qu’il y aura peu de TGV sur la prochaine liaison
Rhin-Rhône parce que les péages sont trop lourds. Hurlements des
élus territoriaux, martiale injonction de Dominique Bussereau. La
SNCF en est réduite à assurer piteusement que bon, bon, d’accord.
La place publique regarde s’agiter les ombres chinoises projetées
sur le fond de la caverne… Tout cela, qui concerne un groupe de
230000 salariés et détermine la place de la France dans l’Europe des
transports, s’est longtemps joué entre quelques dizaines de spécia-
listes, sans que les Français aient une idée des enjeux. »

Des cadres déboussolés
« Dans les mois qui précèdent la fin du monopole, en cette fin d’an-
née 2009, les patrons de la SNCF sentent monter un phénomène qui
pourrait devenir dangereux. L’encadrement est en grand désarroi.
Quelque chose ne colle pas, il y a du mou dans la hiérarchie.
Chacun a son analyse.
«Cela vient des relations sociales,
explique un
dirigeant récemment intégré.
Les politiques sociales sont d’entrée de
jeu posées en fonction de leur acceptabilité par la CGT, pas en fonction de
la logique managériale. Le point de départ est celui du compromis à ve-
nir. Tout le monde est enfermé dans cette construction mentale, qui condi-
tionne tout. Nous, dirigeants, nous sommes sous surveillance, on ne peut
pas construire une politique dans ces conditions.»
« Il y a deux écoles,
dit un autre dirigeant.
Celle qui se précipite pour ré-
pondre quand Le Reste (CGT), Bigarne (UNSA, Union nationale des
syndicats autonomes) ou Duchemin (FGAAC, syndicat autonome des
conducteurs) téléphonent. Ils appellent le président, qui dit à son cabinet
«voyez ce qu’on peut faire», et ça devient comme un ordre du président.
C’est une école imposée. Et puis l’école «on ne décroche pas», qui est ma-
joritaire dans les esprits. On passe de l’une à l’autre, voilà qui démotive la
hiérarchie intermédiaire. Il faut mettre de la distance, cela n’empêche
pas d’être respectueux.»
Celui qui s’exprime ainsi est un grand patron
du fret ferroviaire, qui a depuis quitté l’entreprise. Le problème
vient-il du fret? »

Changement de casquette
pour Guillaume Pepy
« C’est une banalité de remarquer la solitude du chef devant sa dé-
cision. Après avoir fait président les premiers mois de son mandat,
Guillaume Pepy devient président en renonçant à des mouvements
chez lui profondément naturels. Déléguer l’opérationnel, qu’on
connaît par cœur, pour se concentrer sur la stratégie, délaisser l’ex-
position médiatique quand toutes les rédactions ont son numéro
de portable, accepter la solitude quand on recherche le collectif, ré-
fléchir à sept ans quand on carbure à l’adrénaline de l’immédiat,
trancher alors qu’on aime être populaire, prendre de la distance
quand on a le tutoiement facile. En devenant numéro1 en fé-
vrier2008, il ne s’attendait pas à devoir se départir à ce point d’ha-
bitudes de travail de numéro2, dans lesquelles il se sentait telle-
ment à l’aise que le rôle, où il était brillant et reconnu depuis des
années, lui allait comme un gant. »

Imbroglios à Bruxelles
« C’est par Bruxelles que passent les principales torpilles tirées en-
tre concurrents. Tout le monde dépense beaucoup d’énergie à dé-
montrer à l’administration communautaire que les projets des autres
entreprises sont contraires à la concurrence libre et non faussée.
Plus insidieux est le lobbying des experts du ferroviaire. Les spéci-
fications techniques ne sont pas neutres. Une législation sur le bruit
des wagons de fret ou les émissions de moteurs Diesel d’autorails
peut avoir des impacts financiers considérables et avantager un
groupe par rapport aux autres. Les lobbyistes doivent donc être très
vigilants, savoir quelle entreprise est à l’origine de quel projet de rè-
glement et réagir dans l’heure quand un parlementaire veut connaî-
tre leur position. Certaines alliances de circonstance sont cocasses:
on a vu l’Italien, habituellement allié à l’Allemand pour dénoncer le
Français, prévenir en douce le Français qu’un amendement de l’Al-
lemand sur les spécifications techniques de freinage allait leur coû-
ter à chacun 100millions d’euros… »

Les chefs n’ont qu’à bien se tenir
« Quand il entre à la SNCF, le jeune salarié apprend vite à calcu-
ler, à partir d’étapes annuelles sur des grilles d’avancement, ce
que seront vingt ans plus tard, à peu de choses près, sa situation
hiérarchique et son niveau de salaire. L’inconnu n’est pas possible.
L’avenir ne peut être que prévu. Cette donnée est essentielle.
La relation au client va au-delà du commercial. La SNCF appar-
tient aux cheminots, qui sont «en mission» pour le bénéfice des
usagers, dont on aimerait qu’ils soient un peu plus reconnais-
sants et qu’ils ne viennent pas expliquer comment on doit faire le
métier. Ils devraient être toujours unis dans les luttes contre la
casse du service public. Un jour, ils se rendront compte que les
cheminots ont raison. Cheminots, usagers et citoyens sont co-
propriétaires de l’entreprise publique.
Suite cohérente: dans un monde où chacun sait ce qu’il a à faire, à
quoi sert la hiérarchie? Quand on connaît le boulot, on n’a pas be-
soin de chefs. Le clivage entre les agents et la hiérarchie est très fort.
Les dirigeants sont de passage, ce sont des locataires priés de res-
pecter la copropriété. Qu’ils ne se mêlent pas de gérer la SNCF. Les
critères de gestion sont une menace, car ils ébranlent les certitudes.
La gestion met en péril la SNCF, qui se suffit à elle-même et n’a pas
besoin de l’extérieur. Les dirigeants devraient être là pour obtenir de
l’État les «moyens matériels et humains» indispensables au déve-
loppement du service public. Pas pour dire comment s’organiser
dans un métier qu’ils n’ont pas appris dans leurs grandes écoles. »

La Vie du Rail
– 22 septembre 2010
UNE SEMAINE DANS
LA VIE DU RAIL
Réforme des retraites.
D’une grève à l’autre
D
eux jours après la grève et les
manifestations du 7septembre –
réussies, avec selon la CGT près
de 52% de cheminots grévistes et
plus de 2,7millions de manifes-
tants à travers la France, un jour
après une intersyndicale au niveau
national, les quatre fédérations de
cheminots représentatives – CGT,
UNSA, SUD-Rail et la CFDT – se
sont retrouvées afin de décider des
suites à donner au mouvement
contre la réforme des retraites.
Toutes se sont accordées sur une
journée de grève et de manifesta-
tions dans tout le pays ce 23sep-
tembre, dans le cadre
«du mouve-
ment national interprofessionnel
unitaire».
Une façon de rappeler,
précise Didier Le Reste (CGT), que
les cheminots ne peuvent porter
à eux seuls, isolés, les suites du
mouvement, et ne le souhaitent
pas. Les responsables CFDT ne di-
sent pas autre chose, se déclarant
prêts à
«aller plus loin»
mais dans
un cadre interprofessionnel. Et
pour souligner l’aspect national du
mouvement, des demandes de
concertation immédiate, obliga-
toire avant tout dépôt de préavis
de grève, étaient déposées dans
l’ensemble des régions.
Mais la question visant à lancer
dès cette date un mouvement re-
conductible a continué à faire dé-
bat. Sur la nécessité de
«conforter
et amplifier»
la mobilisation, tout
le monde s’accorde. Sur les mo-
dalités, ce n’est plus le cas. Dans
un communiqué commun, CGT,
UNSA et CFDT soulignent qu’il
faut
«s’inscrire dans la durée pour
gagner […]. Sans confondre vitesse
et précipitation»,
position qui suit
d’ailleurs celle du secrétaire géné-
ral de la confédération CGT, Ber-
nard Thibault, lequel a toutefois
mis en garde le chef du gouver-
nement sur les risques d’un blo-
cage:
«Plus l’intransigeance domi-
nera, plus l’idée de grèves
reconductibles gagnera les esprits».
Une perception partagée par Di-
dier Le Reste qui précise:
«Nous
sommes prêts à tout.»
Prêt à tout, SUD-Rail l’est déjà. Ce
syndicat annonçait le 9 qu’il se
préparait à un mouvement recon-
ductible dès le 23, exigeant tou-
jours le retrait pur et simple du
projet de loi et s’engageant à faire
tout pour que
«le prochain mou-
vement interprofessionnel soit recon-
ductible et le plus unitaire possible».
Avis partagé, entre autres, par FO-
Cheminots qui a, le 10septem-
bre, appelé à une reconduction du
mouvement dans neuf secteurs où
il est représentatif: Paris-Nord, Pa-
ris-Est, Paris-Rive Gauche,
Amiens, Limoges, Rouen, Mar-
seille, Montpellier, et la direction
centrale des Ressources humaines.
Son secrétaire général estime ainsi
que
«pour faire reculer le gouver-
nement, il faut bloquer l’économie
au-delà de 24heures.»
De même, Bernard Aubin, res-
ponsable de la CTC-Cheminots,
se dit
«très réservé»
sur une nou-
velle grève de 24heures.
«Avec
seulement des journées de 24heures,
on risque d’affaiblir la mobilisation.»
Reste à savoir si, par une grève re-
conductible, la SNCF serait à
même de tirer tout le mouvement
social. Car si le souvenir de 1995,
et le bras de fer gagné avec le gou-
vernement Juppé restent dans
tous les souvenirs syndicalistes,
celui de la grève reconductible du
printemps dernier qui s’est es-
soufflée demeure très présent dans
les esprits.
P.ascal GRASSART
Le public s’estime bien informé
C’est le premier sondage de ce type commandé par la direction de
la SNCF. Son objectif: tester l’information fournie aux voyageurs par
l’entreprise lors de la dernière grève du 7septembre. Selon ce son-
dage CSA, réalisé les 8 et 9septembre auprès d’un échantillon na-
tional représentatif de 2010 personnes, quelque 86% de ceux qui
ont pris ou devaient prendre le train le 7 estiment que la SNCF les a
bien informés sur les perturbations du trafic liées au mouvement so-
cial. Le chiffre est toutefois limité à 64% pour les personnes em-
pruntant fréquemment le train, soit deux ou trois fois par mois. Pa-
rallèlement, 70% des personnes interrogées ont estimé que le
personnel en gare s’était montré
«disponible»
ce jour-là.
Informatique SNCF.
Des bugs dans la réorganisation
Q
uelques mois après sa prise de
fonction, Michel Baudy a quitté
le poste de président de la co-en-
treprise chargée des prestations
informatiques, mise en place en
début d’année par la SNCF et
IBM. Jacques Orsini remplace Mi-
chel Baudy à la présidence de
cette co-entreprise détenue à
51% par la SNCF (49% pour
IBM) et baptisée Noviaserv.
«En
interne, il se dit que Gilles Albertus,
nommé en avril dernier à la tête de
la DSIT (Direction des systèmes d’in-
formation et de télécommunications
de la SNCF), en remplacement de
Michel Baudy justement, aurait lé-
gèrement tiqué en constatant les dif-
ficultés opérationnelles du chantier
en cours»,
raconte le magazine in-
formatique
01netPro,
qui a dévoilé
l’information.
Selon des syndicats cheminots,
la réorganisation des services in-
formatiques a pris énormément
de retard sur le calendrier.
«Elle a
été lancée dans la précipitation et
sans concertation. Elle se heurte à
une forte résistance en interne. La
participation à la dernière grève des
informaticiens de la SNCF a atteint
80% et a même impliqué des ca-
dres supérieurs»,
rappelle Sébas-
tien Gillet, secrétaire régional ad-
joint (Lyon) à SUD-Rail. Selon
lui, les centres de service qui de-
vaient être mis en place à la fin
du premier semestre ne devraient
pas l’être avant l’an prochain. Le
blog cortis.fr, tenu par un infor-
maticien de la SNCF, indique que
trois entreprises ont été retenues
pour mettre en place des centres
de service. À côté d’IBM, il s’agit
de Capgemini et Sopra. Des en-
treprises qui n’hésitent pas, selon
les syndicats, à délocaliser en
Inde.
Pour contrer le projet, SUD-Rail
s’apprête à saisir en référé le Tri-
bunal de grande instance de Paris
pour défaut de consultation du
CCE.
Marie-Hélène POINGT
Centre de coordination Fret (ici à Modane) : l’informatique est omniprésente.
Christophe RECOURA/
LVDR