Un père et une mère cheminots, une enfance passée dans une maison de garde-barrière, le logis familial, ont fait qu’André Schroll a embrassé lui aussi une carrière à la SNCF. Ses souvenirs d’enfance sont réunis dans un petit livre édité à l’initiative de sa fille Alexandra.
Un père cheminot, une mère garde-barrière… il n’en fallait pas plus pour qu’André Schroll, né en 1945, devienne cheminot à son tour. Mais il avait aussi une passion pour l’écriture et la lecture, et quelques mois avant de décéder en 2010, à la demande de son épouse Claude, « pour qu’il reste quelque chose », il a dicté des fragments de son enfance vécue dans le Haut-Doubs en Franche- Comté, un pays au climat rude. Ce témoignage a pris la forme d’un livre édité à l’initiative de sa fille Alexandra, sous le titre Une enfance dans le Haut-Doubs, 1940-1950 (Ed. Le Lys bleu). « A travers des souvenirs intimes, des anecdotes émouvantes, des instants de vie simples mais porteurs d’une profonde vérité, il parle de ces années vécues à Vaux-et-Chantegrue, Labergement et Granges-Sainte-Marie. De par le métier de ses parents, mon père fait de nombreuses références au chemin de fer », précise Alexandra, qui a tenu à éditer ces souvenirs, « quintessence d’une époque ». Claude, la mère d’André, a été garde-barrière aux Granges Sainte-Marie, à proximité d’une scierie.
En 1947, il a alors deux ans, la famille habitait en gare de Labergement Sainte-Marie. « Papa, employé SNCF, se rendait fréquemment en Côte-d’Or à Blaisy-Bas afin de poursuivre une formation, ceci à intervalles réguliers », raconte André Schroll. « Or, la première fois que j’ai assisté à son départ en train, Maman m’a raconté que je courais derrière les wagons en hurlant éperdument et que j’étais inconsolable pendant de longues minutes. Tant et si bien que par la suite, elle fut obligée de me cacher ces fameux “départs en formation” de Papa afin d’éviter les pleurs et ce gros chagrin d’enfant. » Ensuite, la famille Schroll a quitté Labergement en 1948 pour emménager dans une maisonnette, celle du PN8, à l’orée d’un bois.
La fumée des trains à vapeur noircissait les habits de travail
A l’époque, pas d’eau courante, pas de chaises mais un banc autour de la table familiale, pas de salle d’eau (« jusqu’à ce que la SNCF installe, quelques années plus tard, des WC avec une vraie chasse d’eau et une douche. Quel luxe ! »), pas de commodités mais des cabinets malo- dorants… « Les habits de travail de Papa étaient toujours noircis par la fumée des trains à vapeur […] Les lessives étaient une tâche fastidieuse pour notre mère. » Celle-ci ne disposait pas de machine à laver mais d’une grande lessiveuse, d’une planche à laver en bois et d’une brosse…
En été, André et ses frères et sœurs aidaient à ouvrir les barrières, car les passages étaient nombreux « du fait de la présence des touristes qui séjournaient à l’Hôtel du Pont, tout proche. » André Schroll témoigne aussi de ces grands mo- ments qui marquent l’enfance : « Quand par bonheur, le Tour de France passait dans le Haut-Doubs, Papa nous emmenait […] pour assister à ce grand évène- ment. Nous attendions la caravane avec fébrilité car on nous lançait des ca- deaux. Des visières en carton, des échantillons de toutes sortes: bonbons, cigarettes (sic), lessive, etc. C’était un grand jour pour nous ! » Bien plus tard, lorsqu’il est devenu cheminot, André Schroll était abonné à La Vie du Rail «qu’il lisait avec plaisir chaque semaine», se souvient sa fille. «Mes grands-parents étaient eux-mêmes d’assidus lecteurs du journal ! ».
Pour l’éditeur d’Une Enfance…, ce livre est « un témoignage d’humanité plein d’authenticité et de sensibilité qui transcende les époques, une invitation pour les générations actuelles comme les anciennes à plonger dans un passé vibrant de vie, un miroir délicat d’une époque disparue mais universelle dans son hu- manité ». A. J.-L.
Une enfance dans le Haut-Doubs, 1940- 1950. Par Alexandra Schroll. Ed. Le lys bleu. 12 €.