Une semaine après les conclusions (plutôt mal accueillies par les élus) d’un rapport de l’Inspection des Finances missionnée par le gouvernement pour tenter de sortir de l’impasse financière des transports publics en Ile-de-France, le Groupement des autorités organisatrices de transport (Gart) a présenté dix propositions pour sauver le modèle économique du secteur. « Il y a des petits ruisseaux et des rivières cachées« , a imagé Bernard Soulage, président du conseil scientifique de l’association, en présentant ces pistes de financement, le 28 juin.
Réunis la veille en assemblée générale, les élus des autorités organisatrices de la mobilité urbaine, interurbaine et régionale ont élaboré une liste de mesures sonnantes et trébuchantes qu’ils entendent défendre « auprès de Bercy, Matignon ou l’Elysée« , a indiqué Louis Nègre, sénateur des Alpes-Maritimes et président du Gart. Il vient d’être réélu pour trois ans à la fonction.
Dans la liste de courses :
- Accorder une part plus grande du budget de l’Etat aux transports collectifs du quotidien : « Les prélèvements de l’Etat sur la route atteignent 60 milliards d’euros par an, dont 40 milliards pour la seule TICPE [taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques]« , calcule le Gart qui suggère d’en flécher une plus grosse partie vers la mobilité décarbonnée.
- Oser la hausse des tarifs des transports publics. « Les autorités organisatrices de la mobilité ont la liberté tarifaire, même si ce n’est pas le moment d’augmenter les prix dans le contexte de l’inflation« , nuance Louis Nègre qui a relancé au passage le débat sur la gratuité des transports. En France, la part payée par les usagers ne représente entre 25 à 30% du coût des services, rappelle le Gart.
- Utiliser le produit des baisses d’impôts sur les bénéfices des concessionnaires d’autoroutes pour les transports collectifs. Montant estimé par le Gart : 750 millions d’euros.
- Passer la TVA sur les transports publics de 10% à 5,5%.
- Flécher les recettes des taxes environnementales vers le transport public.
- Abaisser le seuil de perception du versement mobilité. Aujourd’hui, seules les entreprises de plus de 11 salariés s’acquitter de cette taxe qui est une source importante de financement des transports collectifs urbains.
- Appliquer une taxe kérosène sur les vols intérieurs. Aujourd’hui, les compagnies aériennes sont intégralement exonérées de la TICPE, sur tout le territoire français. Une décision qui remonte à la fin de la seconde guerre mondiale, quand le pays a décidé de ne pas taxer le carburant d’aviation pour stimuler les échanges internationaux. « Cette taxe existe aux Etats-Unis et dans d’autres pays européens« , souligne Bernard Soulage. A la clé, 7 milliards d’euros, selon les estimations du Gart.
- Décentraliser la fiscalité sur la logistique urbaine.
- Affecter tout ou parte du produit des plus-values immobilières pour financer les investissements de transport, sur le modèle de la Société du Grand Paris (SGP) pour la réalisation du métro automatique Grand Paris Express.
- Pour réduire l’usage de la voiture en ville, généraliser l’abonnement à une carte de transport multimodale (entre 40 et 50 euros par mois) à l’intérieur d’un périmètre de transport urbain. « En France, c‘est socialement plus acceptable qu’un péage urbain« , constate Bernard Soulage.
L’association des élus du transport va maintenant entamer un road show auprès des autres associations d’élus (France Urbaine, l’Association des maires de France, Régions de France, Intercommunalités de France etc.) pour essayer de défendre ensemble ces pistes de financement auprès du gouvernement. « Il faut partir unis à la bagarre, Bercy gagnera toujours les arbitrages si on ne joue pas collectif sur ce corpus de solutions« , prévient Guy Le Bras, directeur général du Gart.
Un rapport de la Commission des Finances du Sénat sur le même sujet doit être rendu public le 5 juillet.