Le cinéma coréen s’est imposé ces dernières années dans les salles obscures, comme sur les plateformes. A Lyon, l’Institut Lumière propose jusqu’au 20 juillet une rétrospective avec une trentaine de films programmés, dont plusieurs nous emmènent à bord de toutes sortes de trains.
Le cinéma coréen est né à partir des années 1910, pendant l’occupation japonaise. Il devient rapidement un outil de résistance et d’affirmation culturelle. Mais la censure nipponne veille et, à partir des années 1930, seuls quelques films sont produits. La période de la libération cède rapidement la place à un nouveau conflit, il faut attendre la fin de la guerre civile de Corée, en 1953, pour que le premier âge d’or du cinéma coréen démarre.
Il s’achève avec le coup d’Etat militaire de 1961. Après une longue apathie, la production cinématographique se réveille en 1988. Bientôt émerge une « nouvelle vague » coréenne portée par de jeunes cinéastes talentueux. Ce sont leurs productions qui sont présentées à l’occasion de K Cinéma, une rétrospective de 29 films programmée par l’Institut Lumière, à Lyon.
Au menu, des films célèbres comme Parasite, Mademoiselle ou Old Boy, mais également des oeuvres moins connues du grand public. Parmi cette sélection, quatre intéresseront particulièrement les lecteurs de La Vie du Rail.
Inspiré de faits réels, Memories of Murder (2003) de Bong Joon-ho (Snowpiercer, le Transperceneige, Parasite) revient sur une affaire criminelle qui a fortement marqué le « pays du matin calme ». En 1986, le corps d’une jeune femme est retrouvé par des paysans dans la campagne de la province de Gyunggi. Elle a été violée puis assassinée. Bientôt, d’autres crimes similaires ont lieu. Dans un pays peu habitué à ce genre d’atrocités, la rumeur de la présence d’un tueur en série grandit de jour en jour. Une unité spéciale de la police est bientôt créée dans la région afin de confondre rapidement le coupable. Park, un policier local, et Seo, un détective spécialement envoyé de Séoul, forment un étonnant duo d’enquêteurs. Ils finissent par trouver un suspect convainquant : un certain Hyeongyu. Dans une scène cruciale, Seo craque après avoir trouvé le corps d’une écolière avec qui il s’était lié, tout près d’une voie ferrée. Le policier entraine alors le suspect vers l’entrée du tunnel ferroviaire et le frappe à plusieurs reprises. Il braque même son révolver sur la tête de Hyeongyu. Un plan qui sera utilisé pour concevoir l’affiche du film et qui marquera durablement l’esprit du spectateur.
Ce polar coréen particulièrement réussi n’offre pas de réponses absolues aux spectateurs… Il faut souligner qu’en 2004, année de sortie du film, on ignorait toujours l’identité du tueur. La police coréenne ne résoudra ce crime qu’en 2019, en reliant l’ADN d’un homme de 56 ans incarcéré pour des faits similaires.
Dans un tout autre registre, Le Bon, la Brute et le Cinglé (2008) de Kim Jeewoon (A Bittersweet Life, 2 soeurs) est aujourd’hui encore le plus gros budget du cinéma coréen. Ce film est un hommage frénétique et burlesque au cinéma de Sergio Leone et au genre du western. Dans les années 1930, en Mandchourie, alors occupée par l’armée impériale japonaise,
Chang-yi, un violent et cruel malfrat, est chargé par un mafieux de récupérer une mystérieuse carte auprès d’un intermédiaire japonais. Celui-ci voyage à bord d’un train qui traverse la région du Gando, une région mandchoue majoritairement habitée par des Coréens. Dans ce convoi, voyage une foule bigarrée de soldats, de marchands et d’individus plus ou moins louches. Alors que Chang-yi a préparé un guet-apens pour arrêter le train et voler la carte, il est devancé par Tae-goo, un voleur haut en couleur et tête brûlée, qui s’empare du précieux document. La confrontation est inévitable. Tout se complique quand Do-won, un chasseur de primes résolu à arrêter Chang-yi, également présent dans le train, tire, lui aussi, ses premiers coups de feu … Filmé dans le désert de Gobi, le film offre de belles images du train qui file dans un paysage aride et désolé.
Autre film de genre, Dernier train pour Busan (2016) de Yeon Sang-Ho est un film de zombies particulièrement efficace. L’intrigue se déroule essentiellement à grande vitesse dans un Korean Train Express (KTX) entre Séoul et Busan. Un virus inconnu se répand en Corée du Sud, ses victimes devenant d’incontrôlables anthropophages, l’état d’urgence est décrété. A bord du train, les voyageurs vont devoir se battre pour survivre. Et attention, les zombies se déplacent à grande vitesse !
Yeon Sang-Ho réalise ici son premier film en prises réelles, mais a déjà plusieurs films d’animation à son actif, dont Seoul Station, également présenté dans cette rétrospective. Ce dessin animé raconte aussi une histoire de contamination dans la plus grande gare de la capitale sud-coréenne et constitue une introduction au récit de Dernier train pour Busan.
K Cinéma. Institut Lumière. 25, rue du Premier. Lyon. Tél. 04 78 78 18 95 www.institut-lumière.org