Sorti dans les salles obscures le 3 septembre dernier, le film d’épouvante japonais Exit 8 se déroule pratiquement exclusivement dans un couloir du métro de Tokyo.
Le film débute dans une rame du métro de Tokyo, un jeune homme (Kazunari Ninomiya) est plongé dans l’écran de son téléphone portable, le Boléro de Ravel dans les écouteurs. Sa tranquillité est troublée quand un voyageur s’en prend violemment à une jeune mère, qui ne parvient pas à calmer son bébé en pleurs. Personne ne réagit à l’agression verbale… lui non plus d’ailleurs.
Après cet incident, il arrive à la station et entreprend de se diriger vers la sortie, quand il reçoit un coup de téléphone de son ex-petite amie qui l’appelle de l’hôpital. Celle-ci lui annoncer qu’elle est enceinte. Une nouvelle qui le plonge dans le doute et la perplexité. Mais, bientôt la connexion déraille et coupe totalement. Le jeune homme tente alors de rejoindre la sortie n°8. Mais, il se retrouve prisonnier d’une boucle spatiale et temporelle. Pour s’en extraire, il doit repérer les anomalies qui surgissent régulièrement sur son parcours à travers le couloir de correspondance. S’il en voit une, il doit faire demi-tour. S’il n’en voit aucune, il peut continuer son chemin en espérant parvenir enfin à trouver la sortie n°8. A chaque erreur, il est renvoyé à son point de départ. Dans ce labyrinthe aux murs recouverts de carreaux blanc immaculé, l’espace et le temps sont complètement distordus.
Le jeune homme doit scruter les moindres détails. Cinq affiches placardées dans le couloir – dont l’une annonçant une exposition de l’artiste néerlandais Maurits Cornelis Escher, célèbre pour ses trompe-l’oeil, ses constructions impossibles et ses explorations du thème de l’infini. Trois portes, des caméras de sécurité, des casiers de consigne, une couverture et un gobelet, un photomaton… Autant de possibilités de se tromper. Il croisera d’autres voyageurs prisonniers du couloir, mais sont-ils de simples avatars ou de vrais humains ? Impossible à dire. Un homme d’âge mûr, une adolescente, un enfant mutique… Autant de personnages qui errent dans les dédales de ce métro cauchemardesque. Prisonnier ou maton ? Ici, tout est possible et aucune certitude sur laquelle se reposer…
Ecrivain, cinéaste et réalisateur de série, Genki Kawamura s’essaie ici au film de genre. Adaptation d’un jeu vidéo mis en ligne en 2023 et devenu viral. En avril 2025, le jeu s’était vendu à 1,7 million d’exemplaires vendus à travers la planète. L’action se déroule dans une boucle infinie, où le joueur doit repérer des anomalies pour pouvoir s’échapper. Fort de ce succès, une suite – Plateform 8 – a d’ailleurs vu le jour en novembre 2023.
Genki Kawamura explique : « Je désirais réaliser un film d’horreur se déroulant dans le Tokyo moderne, brouillant les frontières entre rêve et réalité, temps et espace — à l’image des « Les contes de lune vague après la pluie » de Kenji Mizoguchi, un film que j’admire profondément.
En cherchant le bon motif, je suis tombé sur un jeu indépendant intitulé « Exit 8 », créé par un jeune homme d’une vingtaine d’années vivant à Kyoto. J’ai été captivé. Le design du jeu — un passage souterrain stérile, propre et ordonné, typiquement tokyoïte — devient un cauchemar en boucle sans échappatoire. »
Prisonnier du triptyque « Métro, boulot, dodo », la vie de l’usager nippon est un éternel recommencement. Comme partout sur la planète : la banalité du quotidien du salarié est une réalité de portée universelle. En France aussi, les transports en commun peuvent ressembler à un purgatoire. D’ailleurs, après avoir vu Exit 8, la prochaine fois que vous serez seul dans un couloir de correspondance, vous risquez vous aussi de compter les portes, de scruter les affiches et de régulièrement regarder par-dessus votre épaule pour vous assurer qu’aucune anomalie ne jalonne votre parcours…
Exit 8 de Genki Kawamura. Toho Company. Japon. (2025)