Lancée le 6 juillet en grande pompe par Jean-Pierre Farandou, président du Groupe SNCF, en présence de Clément Beaune, ministre délégué chargé des Transports et d’Agnès Pannier-Runacher, ministre de la Transition énergétique, la nouvelle filiale SNCF Renouvelables marque l’arrivée du transporteur dans la production d’énergie renouvelable… Ou plutôt le retour, si l’on veut se souvenir qu’en tant que maison-mère de la SHEM, héritée de la Compagnie du Midi, la SNCF a été productrice d’hydroélectricité entre 1938 et 2006.
Alors quoi de neuf sous le soleil ? L’énergie solaire, justement ! Car c’est sur cette source que SNCF Renouvelables va miser. Première industrie consommatrice d’électricité en France, la SNCF est aussi le deuxième propriétaire foncier de France, derrière l’Etat. Sur ses considérables réserves foncières, la SNCF pourra installer des centrales solaires principalement destinées à alimenter en électricité une partie du réseau ferré et des 3 000 gares ou autres bâtiments industriels et tertiaires. Plus précisément, sur 1 000 hectares réservés à cet effet, la SNCF « ambitionne d’installer 1 000 mégawatts-crête (MWc) de capacités photovoltaïques d’ici 2030, dont la production pourra représenter 15 à 20 % de ses besoins actuels en électricité », chiffrés à 9 TWh (dont 8 TWh pour la traction électrique des trains). Pour le président du Groupe SNCF, « 1 000 MWc, c’est équivalent d’un gros réacteur nucléaire et à peu près la production du leader actuel de l’énergie solaire ».
Une telle décision répond aux exigences de décarbonation, contribuant aux objectifs de la France en matière de production d’énergies renouvelables, mais aussi à la sécurisation des approvisionnements en électricité… et à la maîtrise des coûts. Car être productrice de sa propre électricité (comme les CFF en Suisse, par ailleurs, mais au moyen de barrages) devrait ainsi mettre la SNCF à l’abri des hausses sur le marché, dans un contexte de crise. De plus, en devenant productrice, le rôle de la SNCF ne se réduira plus à être « un loueur de terrains », a clarifié Jean-Pierre Farandou, insatisfait du modèle régissant actuellement les panneaux solaires déjà installés sur les toitures et parkings des gares, par exemple.
Et si la SNCF est aujourd’hui la première consommatrice d’énergie en France, avec une part comprise entre 1 à 2 % de la production globale du pays, ses besoins sont appelés à croître avec le développement du ferroviaire souhaité par Jean-Pierre Farandou : « on ose voir grand ! » Et « 20 % d’énergie solaire, ce n’est pas de la communication », a commenté Clément Beaune : l’investissement se chiffrera « en gros à un milliard d’euros sur 7 à 10 ans », selon Jean-Pierre Farandou, en comptant « un million par hectare, c’est-à-dire par mégawatt ». Et le dirigeant d’ajouter que le Groupe SNCF aura des partenaires : industriels, collectivités, financiers. En attendant, l’activité de SNCF Renouvelables débutera cet été, avec à sa tête Emmanuel Mroz, actuellement directeur délégué de la transition énergétique au sein de la SNCF.
Une deuxième phase du développement des activités de SNCF Réseau est déjà envisagée au-delà de 2030. « En fonction de l’évolution des travaux de recherche et développement, des panneaux solaires longitudinaux et verticaux pourront être installés par segments de 20 à 30 km le long des voies non circulées », sur environ 7 000 km de linéaire. A terme, une capacité maximale de 10 000 hectares de foncier pourrait ainsi être exploitée, un décuplement qui correspondrait à une production de quelque 10 000 MWc. Soit plus que la couverture des besoins énergétiques actuels de la SNCF, tout en étant en ligne avec les ambitions d’accroître le trafic en offrant une réserve pour assurer de nouveaux trains…
Malgré cette autosuffisance en termes statistiques, « il faudra acheter de l’énergie par moments et en revendre à d’autres », a tempéré Jean-Pierre Farandou. Toutefois, selon Agnès Pannier-Runacher « cette énergie solaire va aussi générer des recettes, qui serviront à moderniser des lignes ». En commençant par permettre des économies : pour SNCF Voyageurs, de 2022 à 2023, le poste énergie a connu une augmentation de 500 millions d’euros, a rappelé Jean-Pierre Farandou, qui a ajouté que l’innovation en matière d’énergie comprenait aussi un volet stockage, qui pourrait éventuellement être effectué sous forme d’hydrogène…