Le 14 juin, le V 300 Zefiro de Bombardier, dernier-né des trains à grande vitesse, entrait en service sur Turin – Milan – Rome – Naples. C’est la version italienne du CRH 380 D, apte à 380 km/h, dont la première rame – d’une commande de 85 unités – avait été livrée trois semaines plus tôt à CRC (China Railway Corporation, les Chemins de fer chinois). Également conçus pour CRC, et appartenant aussi à la nouvelle plate-forme Zefiro, les CRH 1 et CRH 1 A 250 sont, eux, des trains limités à 250 km/h, qui circulent en Chine depuis 2010. Le 28 octobre, Pietro Diamantini, directeur du projet Frecciarossa 1000 (grande vitesse new-look) chez Trenitalia, crée la surprise en annonçant que l’opérateur historique entend bien exploiter le Zefiro sur Paris – Bruxelles avant 2020. Il dit vouloir aller très vite. Et craint d’autant moins de partir affronter, sur leur propre terrain, Thalys dès aujourd’hui et la DB demain qu’à la différence des autres opérateurs européens, Trenitalia possède déjà l’expérience de la compétition sur le marché de la grande vitesse dans son propre pays, grâce à l’entreprise ferroviaire privée (en partie à capitaux SNCF) NTV. Du coup, les relations ferroviaires entre Paris et l’Italie passent au deuxième plan pour Pietro Diamantini. Qui aurait imaginé, il y a quelques années, que des conducteurs italiens « tireraient » des trains à grande vitesse des FS sur Paris – Bruxelles ? Pour le V 300 Zefiro, Bombardier a mobilisé l’ensemble de ses ressources d’expertise au niveau européen, et s’est associé à l’italien Ansaldo-Breda, qui assure l’assemblage. Ce train de huit voitures reposant chacune sur deux bogies, du type « à motorisation répartie » avec quatre motrices (dont les voitures d’extrémité) et quatre remorques (alternées avec les motrices), se conforme bien plus facilement au standard asiatique « caisses larges, quais hauts » que la formule articulée propre au TGV. L’aérodynamique impressionne, avec l’absence de discontinuité dans la silhouette du nez. Le design est signé Bertone.
Quatre classes sont offertes à la clientèle, dont la plus luxueuse (Executive) ne compte que 10 sièges (deux par rangée), qui peuvent pivoter à 180°. Bombardier a aussi inventé un concept de maintenance révolutionnaire. Dénommé CBM (conditioned-based maintenance), il n’est basé, pour la première fois, ni sur le temps ni sur le kilométrage, mais sur l’état réel, à tout instant, du matériel. Des capteurs sur les principaux organes suivent en permanence les dérives par rapport au fonctionnement nominal. La modélisation de leur évolution prévisible, grâce à des algorithmes mathématiques, permet d’anticiper l’échéance à laquelle la maintenance doit intervenir… 13 rames, sur les 50 commandées, sont déjà en service. Deux autres sont réservées aux montées en vitesse jusqu’à 385 km/h sur Turin – Milan, en vue d’homologuer le matériel à 360 km/h : une première en Europe. Les performances en accélération sont remarquables, avec une valeur de 0,7 m/s2 qui, selon Luigi Corradi, directeur général de Bombardier pour l’Italie, permettrait un gain de temps de 10 à15 min sur Milan – Rome! En cabine de conduite, on note le bon comportement dynamique, sauf à 250 km/h sur la « vieille » direttissima Rome – Florence, où des phénomènes d’usure ondulatoire se font ressentir…