On connaît très peu les premières réactions surgies du terrain à l’annonce de la construction de la première ligne à grande vitesse (LGV) et de l’avènement du TGV qui allait la parcourir. Faisant fi des reliefs du pays d’Othe et du Morvan que l’artère majeure du PLM avait dû contourner, enjambés sans difficultés grâce à ses rampes de 35 mm/m, la ligne nouvelle allait traverser six départements. L’Yonne, département agricole, viticole et riche en belles forêts, va se distinguer par de nombreux foyers de résistance dispersés mais bien fédérés, avant de profiter des retombées positives qui suivront l’ouverture des chantiers en 19761.
Quelques oppositions en haut lieu…
A-t-on oublié que le projet de TGV a été contesté en très haut lieu? Pour la chambre de commerce et d’industrie de Paris, ce projet « ne présente pas le même degré de priorité et d’urgence que les très nombreux investissements nécessaires pour améliorer les transports urbains, notamment dans les agglomérations parisienne et lyonnaise » (25 février 1971). Les dessertes existantes, par route, fer ou air, une fois améliorées, pourront assurer un trafic en hausse. Bref la CCI de Paris « regretterait vivement que le projet présenté par la SNCF soit retenu par le gouvernement. » Celle de Lyon, engagée dans la construction d’un nouvel aéroport à Satolas, pressent un possible redoutable concurrent, moins intéressée par l’aménagement d’une nouvelle gare à la Part-Dieu… Bien moins concerné, le sénateur élu par les Français d’Outremer Jacques Habert s’interroge: « Le grand dessein, c’est de réaliser une performance technique spectaculaire. Est-ce bien utile? Deux heures de Paris à Lyon, la belle affaire. Les gens vraiment pressés continueront de prendre l’avion » (Dijon, Le Bien public, 30 novembre 1976). « Un péril pour la nature », tel est le TGV selon le magazine L’Ami des Jardins et de la Maison (mai 1978): « Environ 500 ha de forêts seront détruits et, au bas mot, 9000 ha de terrains soustraits à la culture, sans parler des nuisances apportées par le bruit et se répercutant sur environ 13000 ha. C’est le parc naturel régional du Morvan écorné, la forêt d’Othe éventrée (…) de délicats équilibres biologiques à jamais perturbés… ».