Après la « Une » du journal Le Monde consacrée le 7 septembre aux « projets radicaux d’Emmanuel Macron pour réinventer la SNCF », deux grandes questions se posent.
Première question : comment se fait-il que l’on s’intéresse, près de deux mois après, à une information publiée en juillet ?
Les commentaires sont nombreux à y voir une opération pouvant servir à mobiliser les cheminots autour de sujets consensuels. « À moins d’une semaine de la manifestation contre la loi travail, agiter le chiffon rouge peut contribuer à renforcer les effectifs dans la rue », estime Gilles Savary, l’ancien député socialiste qui a été rapporteur de la loi sur la réforme ferroviaire. Les Infos de juillet citent en effet Emmanuel Macron lors d’une rencontre organisée le 1er juillet avec dix cheminots (soigneusement sélectionnés afin de représenter les différents métiers de l’entreprise, et non syndiqués), en marge de l’inauguration des deux LGV, expliquant qu’il souhaite que la SNCF se « réinvente ». Il envisage « au premier trimestre 2018, une loi cadre qui donne le top départ de cette réforme », et qui remettrait en cause le système de retraite des cheminots en les faisant entrer dans le régime général. Ce qui est sûr, c’est que la reprise des propos du chef de l’État tombe à un mauvais moment pour le gouvernement : Christophe Castaner, le porte-parole du gouvernement, est aussitôt monté au créneau en modérant les paroles du président de la République et en assurant qu’il ne s’agissait que « de pistes de réflexion ». Quant à la SNCF, interrogée par La Vie du Rail, elle juge que c’est du « réchauffé ».
Deuxième question : Comment se fait-il que les organisations syndicales de cheminots n’aient pas aussitôt réagi au compte rendu publié dans Les Infos sur cette rencontre ?
On était encore quasiment dans la campagne, dans les intentions, estime-t-on à la SNCF. Le reste de l’entretien a été jugé positivement, du moins au sommet de l’entreprise, puisque la question d’un allégement de la dette est sur la table et puisqu’Emmanuel Macron, en voyant l’avenir de la SNCF comme un opérateur de référence du XXIe siècle, « acteur des mobilités plurielles », va dans le sens de la stratégie aujourd’hui suivie. Ce qui amène à se poser la troisième question : Les Infos étaient-ils le bon canal pour informer les cheminots ? Tout le monde l’a vu dans l’entreprise, affirme la SNCF. Largement diffusé dans l’entreprise (le journal est tiré à plus de 85 000 exemplaires et distribué dans l’ensemble des directions et des établissements), l’article n’a pourtant donné lieu à aucune reprise, ni à aucune réaction de la part de syndicats habituellement prompts à réagir sur de tels sujets. L’article a aussi été publié sur le site de l’entreprise. Les propos d’Emmanuel Macron ont été validés par l’Élysée, Guillaume Pepy a fait des chats sur le sujet. Mais apparemment, cela n’a pas été suffisant. Et c’est Guillaume Pepy qui a remis le sujet sur la table, en en parlant lors d’un récent dîner avec des patrons de rédaction. Maladresse ou intention ? Les deux options se défendent.